L’Algérie des sixties, Roland C. Wagner la connaissait bien, lui qui est né à Bab El Oued en 1960. Il lui a fallu près de vingt ans pour écrire ces Rêves de Gloire, son meilleur roman, et aussi son plus personnel. Son uchronie s’affranchit des lois du genre et dépasse le cadre de la science-fiction. À défaut de devenir un classique de la littérature française, qui ne voit pas d’un bon œil l’intrusion de l’imaginaire dans la fiction, il s’impose comme un roman incontournable de la science-fiction française.

Wagner - Rêves de Gloire - Mobilis
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Rêves de Gloire, de Roland C. Wagner, paru chez l’Atalante en 2011, appartient à la catégorie des romans qui, dès la dernière page tournée, nous donne l’envie d’en parler, avec l’espoir qu’il suscitera le même engouement dans notre entourage, le même plaisir partagé. […]

[Un] contenu foisonnant, coloré, labyrinthique. En un seul mot cette fois : kaléidoscopique.

[…] Habituellement, une uchronie présente un point de divergence historique ; à l’auteur ensuite de décrire le monde tel qu’il aurait pu être. Mais Wagner multiplie les points de divergence (l’assassinat de Charles de Gaulle, la tentative d’assassinat ratée de Kennedy, l’intervention ratée des Soviétiques en Hongrie en 1956, etc.) pour plonger son lectorat dans une histoire alternative, un espace-temps réinventé.

L’espace, c’est l’Algérie. […] Wagner modifie les événements et ainsi change l’histoire, mais les hommes restent les mêmes et leur environnement, quoique différent de notre réalité, n’est ni pire ni meilleur. La tentation de l’utopie ou de la dystopie n’effleure pas l’auteur, qui aurait pu s’approprier les paroles d’un certain Snake Plissken, entendues dans le film Escape from L.A. : “The more things change, the more they stay the same.” (“Plus ça change, plus c’est la même chose.”)

Le temps, ce sont les sixties. Certes, le lecteur se promène sur toute la seconde moitié du XXe siècle, mais les années 60 se taillent la part du lion, avec sa musique, qui passe du “gymnase” au “psychodélisme” (de la pop au psychédélisme), sa “Gloire” et ses “vautriens”. […]

L’Algérie des sixties, Roland C. Wagner la connaissait bien, lui qui est né à Bab El Oued en 1960. Il lui a fallu près de vingt ans pour écrire ces Rêves de Gloire, son meilleur roman, et aussi son plus personnel. Son uchronie s’affranchit des lois du genre et dépasse le cadre de la science-fiction. À défaut de devenir un classique de la littérature française, qui ne voit pas d’un bon œil l’intrusion de l’imaginaire dans la fiction, il s’impose comme un roman incontournable de la science-fiction française, récompensé par plusieurs prix : grand prix de l’Imaginaire, nouveau grand prix de la science-fiction française, prix européen Utopiales, prix ActuSF de l’uchronie et prix Rosny aîné (posthume).

S’il y a un seul reproche à formuler sur ce roman, c’est à la réalité que nous le ferons. Roland C. Wagner est décédé en 2012 dans un accident de voiture, comme Albert Camus, qu’il avait ressuscité dans les 700 pages de ses Rêves de Gloire. Ironie du sort nous privant d’une œuvre future qu’il nous reste, à nous lecteurs, à imaginer.
 
Romain Allais
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Publié le 12 novembre 2015

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