Dans sa série Les archives des Collines-Chantantes, Nghi Vo compile des histoires qu'elle nous narre sous la forme de contes. Raconté de manière éparse, il nous faut toujours démêler ce qui touche directement les personnages présents de ce qui relève de figures légendaires.
Chacune des sorties de l'archiviste est donc l'occasion de collecter ces récits de vie afin de les consigner et ainsi en garder une trace. Aussi, le duo formé par l'adelphe et la huppe incarne ici la mémoire à transmettre aux générations suivantes. D'ailleurs, cette thématique est le fil directeur de ces trois novellas car derrière les hauts faits qui nous sont contés se dessine le destin agité d'un empire.
Bien loin des canons classiques de la fantasy où l'intrigue s'inscrit dans une lutte entre le Bien et le Mal avec des personnages qui prennent part pleinement à celle-ci, ici Nghi Vo nous propose plutôt une balade louvoyant entre présent et passé. En effet, ses deux principaux interviennent davantage comme observatrices plutôt qu'en tant que véritables actrices des événements. Submergées par l'afflux d'informations, elles sont davantage concentrées sur la manière de les retranscrire. Ainsi, Nghi Vo articule sa dernière novella autour du questionnement sur les choix faits par le passeur d'histoires car obligatoirement des détails seront occultés pendant que d'autres seront ajoutés. L'autrice rappelle que ces annales sont donc le fruit d'une perception subjective d'un tiers et qu'elles ne reflètent à ce titre que la vérité du témoin.
Même si Nghi Vo cantonne bien souvent Chih et Presque-Brillante à un rôle passif, il n'en demeure pas moins que l'action et le danger hantent bien les pages de cette novella. Il faut dire qu'elles vont traverser les Méandres, une région infestée de brigands. Ces derniers se sont constitués en une secte que l'on appelle la Main creuse et dont l'ombre inquiétante va assombrir la sérénité de leur voyage et laisser fleurir un sentiment d'épouvante.
Entre peur diffuse et tension latente, ce texte distille une atmosphère teintée d'effroi qui tient son lectorat en haleine le temps d'en connaître le fin mot de l'histoire.
Dans Les archives des Collines-Chantantes, Nghi Vo a pris les habits d'une ménestrelle pour nous emporter dans un maëlstrom de légendes toutes plus passionnantes les unes que les autres.
Chacun de ses textes est riche du point de vue de la diversité de ses personnages. Elle accorde une importance aux anciens, à la figure de la femme forte et à la sororité. Derrière l'aspect suranné de ces histoires s'exprime un engagement qui s'inscrit bien dans notre époque.
Pour conclure :
Délicate et sensible, la plume de Nghi Vo renoue avec son héritage culturel pour nous livrer trois novellas empreintes d'une puissante féérie.