C'est une fable politique d'inspiration asiatique, portée par une prose délicate et poétique, qui nous conte une histoire à la fois douce et cruelle. Oui, c'est un peu l'histoire des paradoxes... Celle des silences et des non-dits, où l'on comprend à demi-mot ce qui reste.
L'adelphe Chih, accompagné de sa fidèle huppe Presque-Brillante, se fait lea collecteur de la parole de Lapin, qui fut la fidèle compagne d'une impératrice envoyée en exil par son mari. J'ai aimé découvrir cette histoire politique par le biais de l'intime, ou comment l'examen de différents objets du quotidien permet d'alimenter des révélations et de témoigner de tant de secrets inavoués et inavouables.
L'ambiance est intimiste et feutrée et pourtant le récit est tour à tour féroce, enjoué, nostalgique, émouvant, sanglant. Cette novella de 120 pages réussit, en l'espace de quelques mots, à nous faire réfléchir sur la cruauté du pouvoir, sur les infimes espaces de liberté que l'on peut se créer dans un exil surveillé, et sur le pouvoir de la mémoire comme outil de transmission de l'histoire. Vraiment, L'Atalante nous gâte encore une fois par cette parution à son image : atypique, étonnante, réflexive, une pépite !
Chih avait grandi avec l'histoire du monde qui imprégnait les murs de son foyer, qui voletait au-dessus de sa tête, qui se mêlait à l'orge de ses repas. C'était la première fois qu'il en sentait le poids peser sur son être, l'envelopper telle une couverture de laine humide.