Entre les méandres est à la hauteur de nos attentes !
Nous retrouvons avec plaisir Presque-Brillante, l’oiseau à la mémoire infaillible, et à la langue bien pendue. Les interactions entre Chih et la neixin sont souvent très drôles, et nous permettent de mieux connaître la jeune adelphe. Ses relations avec les autres personnages, et entre ceux-ci, sont au cœur de ce récit, plein d’aventures, mais d’une belle profondeur.
Cette fois-ci, l’adelphe n’est plus seulement confronté aux histoires, mais également au réel, parfois très cru. La violence et la mort s’invitent dans ce voyage, imposant au novice le douloureux apprentissage de l’angoisse et de la disparition tangible.
L’impitoyable réalité se mêle aux légendes et amène Chih à reconsidérer sa lecture des récits qu’il archive. La jeune apprentie grandit au fil de cette aventure, que l’autrice nous raconte comme une balade, intégrant le lecteur au cœur de ce petit groupe dont on découvre petit à petit les secrets, comme l’adelphe.
L’écriture de Nghi Vo est magnifique, pleine de poésie et de douceur, même lorsqu’elle dépeint des événements tragiques. Elle parvient à planter un décor en quelques lignes, et s’attache ensuite à nous enchanter en déroulant le fil d’une histoire et en s’interrogeant sur la manière dont une légende se construit. Chaque conteur omet des détails, en ajoute d’autres. Le récit n’est finalement que le reflet de celui qui le raconte… Y compris notre propre vie, nos propres souvenirs, qui ont autant de réalités que de personnes qui ont croisé notre route. La vérité revêt bien des formes, les légendes évoluent au gré du temps qui passe, en s’enracinant dans le réel, et jusque dans le présent, pour former une trame qui nous interroge et nous fascine.
Porté par des personnages marquants, à la personnalité forte, et par une écriture très maîtrisée, remarquable de sensibilité et d’intelligence, Entre les méandres parvient une nouvelle fois à nous séduire – et à nous donner envie de relire les deux précédents volumes !
Sylvie Gagnère