Journal d'un AssaSynth est donc une série qui allie le divertissement de surface au sens profond, tout ce que j'aime dans la littérature en général, et dans le space opera en particulier.

Journal d'un AssaSynth - Impromptu
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Comme toujours dans les oeuvres que j'apprécie le plus, celle-ci propose un récit d'aventure en surface, et une réflexion philosophique sur l'existence et la conscience, dans le fonds. Dès ma lecture de la première novella, et ceux qui me suivent sur les réseaux s'en souviennent peut-être, j'ai partagé quelques lignes qui m'ont fait glousser, voire pouffer :

C'était pire que ce que je croyais. [...] Ils étaient arrivés à la conclusion qu'il ne fallait pas "me mettre la pression". Ils étaient tous tellement gentils que ça en devenait abominable.

Car en effet, AssaSynth fait preuve d'une ironie dévastatrice dans son récit, ironie qui lui permet de gérer tant bien que mal les conflits inévitables entre sa part de machine factuelle et analytique, et les vagues émotionnelles très humaines, issues de sa partie organique, qui viennent le parasiter bien trop souvent à son goût.

La gestion de ses émotions constitue l'un des points centraux de l'évolution d'AssaSynth tout au long de la série, et le lecteur peut mesurer ses progrès en la matière - ou pas ! - à la fréquence à laquelle il se réfugie dans ses épisodes préférés de série télé, qu'il visionne et revisionne, tel une Blop qui relit son livre doudou chaque année (Le Vol du Dragon d'Anne McCaffrey, pour les curieux).

L'autrice émaille donc le récit de réflexions et commentaires personnels d'AssaSynth, souvent très drôles, toujours sarcastiques et, au moins en surface, légèrement humanophobes. Car il est bien évident que ce cyborg nourrit des sentiments aussi profonds que niés pour ses compagnons humains, sentiments qu'il s'évertue à qualifier de toutes les façons possibles, sauf bien entendu celles qui entrent dans le champ sémantique de l'émotion.

Ces pas de côté au beau milieu de scènes d'action offrent une respiration décalée, souvent inattendue, et l'ensemble propose des novellas dont le rythme rapide n’essouffle pas le lecteur, en y injectant de la profondeur de champ.

Le roman est, lui, un peu moins bien équilibré. Néanmoins, le contexte ayant été très convenablement posé dans les 4 novellas précédentes, on se laisse porter par les aventures d'AssaSynth et de ses associés humains.

Le plus intéressant étant d'ailleurs dans ce 5e opus, l'exploration de la relation entre AssaSynth et le vaisseau-bot Périhélion, rencontré dès la fin du premier tome. Les deux entités nouent un lien complexe, indéfinissable, et très hautement divertissant pour le lecteur, qu'AssaSynth refuse catégoriquement de qualifier d'amitié, puisque ce concept est humain et donc, non applicable dans le champ des relations robot-cyborg. Or ce lien évolue énormément durant le 5e tome, et l'exploration de leurs identités respectives constitue l'un des coeurs du récit.

Tout dans cette oeuvre tourne autour des questions de l'identité, de la conscience et de la relation à l'autre, quand rien dans le monde n'est prêt à admettre qu'il y a là une conscience, une identité et une altérité à reconnaître. Journal d'un AssaSynth est donc une série qui allie le divertissement de surface au sens profond, tout ce que j'aime dans la littérature en général, et dans le space opera en particulier.

Publié le 19 juillet 2022

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