Une couverture rappelant furieusement ces clichés de la Terre vue depuis l’espace qui me font rêver, mais sur lesquels on découvre une structure étrange, gigantesque, en orbite autour de cette planète ; et un titre qui titille mon imagination, faisant ressurgir les souvenirs de mes brèves expériences en archéologie : c’est l’époustouflant Vestiges, de Laurence Suhner. Mon avis Éblouissant ! Ce premier roman est un mille-feuille : de prime abord planet opera puisqu’on est sur une autre planète que la nôtre ; également roman d’aventures avec ses héros comme Haziel (le physicien pilote d’avion) et Ambre (docteur en microbiologie qui dirige les fouilles) qui, pétris de doutes et de craintes, n’hésitent pas à plonger dans l’action, mais aussi avec ses miliciens armés jusqu’aux dents, ses idéalistes planqués et ses scientifiques résolus à tout pour comprendre et partager leurs connaissances ; enfin, roman à suspense, qui me laisse sur ma faim et me fait regretter de ne pas avoir le tome suivant sous la main. L’intrigue est solidement ficelée : on passe de personnage en personnage sans problème, chacun dévoilant un pan de cette planète glaciale qu’est Gemma, et au travers des enjeux de chacun se dessine une trame plus large. On est embarqué avec ces équipes dont les membres viennent de tous les continents terriens, et on est comme eux fasciné par les étranges vestiges qui reposent au cœur de Gemma, et terrifiés par les secrets qui seront révélés. L’image de la boîte de Pandore est utilisée plusieurs fois, et c’est bien de ça qu’il s’agit : l’excitation que procure la proximité d’un savoir tout neuf, alliée à la terreur née des conséquences qu’aura cette révélation sur notre conscience de l’univers – ou sur l’univers lui-même. Lord Carter et les autres archéologues découvreurs de grandes civilisations humaines ont certainement ressenti cela, et vaincu leurs terreurs par leur passion du savoir. On se prend même à douter en repensant au mythe de la malédiction de Toutankhamon… On pourrait s’en tenir là et à l’incroyable maîtrise du style (descriptions vivantes, dialogues réussis, et même bols indiens et poèmes au souffle mythologique), mais non : ce roman est également très richement documenté. À l’image des humanistes du XVIIIe siècle qui souhaitaient réunir le savoir de façon encyclopédique, les chercheurs de Laurence Suhner travaillent en collaboration intelligente et débattent ensemble de médecine, de physique quantique, de philosophie. Enfin, tout comme elle jongle avec une somme de connaissances incroyables (voir son interview par Actu SF pour mieux comprendre), elle compose également une symphonie synesthésiste en jouant avec tous nos sens, et en stimulant notre imagination pour recomposer sons, odeurs, sensations de froid... En relisant cet avis, je vois que je n’ai pas évoqué l’importance du thème de l’Autre : cet être intelligent, non humain, que l’on rencontre et dans la peau duquel on entre, pour découvrir tout un pan de la mythologie de Gemma, de son histoire… et surtout pour comprendre le principe d’altérité et s’ouvrir à une autre conscience, au-delà de l’humanisme. Un roman très riche, donc, que je ne manquerai pas de relire pour en apprécier davantage les détails – portée par le suspense, j’ai lu les 400 dernières pages en moins de 24 heures… Un régal. Bonus Sur le site dédié à la trilogie http://quantika-sf.com, on découvre non seulement le résumé de chaque tome, ainsi que des extraits à lire et lus, mais aussi la bande-son dont de la musique venue d’Inde (très importante pour un des personnages), des illustrations de l’auteur (la trilogie était à l’origine un projet de BD), des vidéos… Une multitude de facettes à l’image des talents de l’auteure. Interview de Laurence Suhner par Actu SF : « QuanTika a toujours été pour moi un mélange d’images, de textes et de sons. »   Chronique À l'ombre des nénuphars

Suhner - Vestiges - À l'ombre des nénuphars

Une couverture rappelant furieusement ces clichés de la Terre vue depuis l’espace qui me font rêver, mais sur lesquels on découvre une structure étrange, gigantesque, en orbite autour de cette planète ; et un titre qui titille mon imagination, faisant ressurgir les souvenirs de mes brèves expériences en archéologie : c’est l’époustouflant Vestiges, de Laurence Suhner.

Mon avis
Éblouissant ! Ce premier roman est un mille-feuille : de prime abord planet opera puisqu’on est sur une autre planète que la nôtre ; également roman d’aventures avec ses héros comme Haziel (le physicien pilote d’avion) et Ambre (docteur en microbiologie qui dirige les fouilles) qui, pétris de doutes et de craintes, n’hésitent pas à plonger dans l’action, mais aussi avec ses miliciens armés jusqu’aux dents, ses idéalistes planqués et ses scientifiques résolus à tout pour comprendre et partager leurs connaissances ; enfin, roman à suspense, qui me laisse sur ma faim et me fait regretter de ne pas avoir le tome suivant sous la main.
L’intrigue est solidement ficelée : on passe de personnage en personnage sans problème, chacun dévoilant un pan de cette planète glaciale qu’est Gemma, et au travers des enjeux de chacun se dessine une trame plus large. On est embarqué avec ces équipes dont les membres viennent de tous les continents terriens, et on est comme eux fasciné par les étranges vestiges qui reposent au cœur de Gemma, et terrifiés par les secrets qui seront révélés. L’image de la boîte de Pandore est utilisée plusieurs fois, et c’est bien de ça qu’il s’agit : l’excitation que procure la proximité d’un savoir tout neuf, alliée à la terreur née des conséquences qu’aura cette révélation sur notre conscience de l’univers – ou sur l’univers lui-même. Lord Carter et les autres archéologues découvreurs de grandes civilisations humaines ont certainement ressenti cela, et vaincu leurs terreurs par leur passion du savoir. On se prend même à douter en repensant au mythe de la malédiction de Toutankhamon…
On pourrait s’en tenir là et à l’incroyable maîtrise du style (descriptions vivantes, dialogues réussis, et même bols indiens et poèmes au souffle mythologique), mais non : ce roman est également très richement documenté. À l’image des humanistes du XVIIIe siècle qui souhaitaient réunir le savoir de façon encyclopédique, les chercheurs de Laurence Suhner travaillent en collaboration intelligente et débattent ensemble de médecine, de physique quantique, de philosophie. Enfin, tout comme elle jongle avec une somme de connaissances incroyables (voir son interview par Actu SF pour mieux comprendre), elle compose également une symphonie synesthésiste en jouant avec tous nos sens, et en stimulant notre imagination pour recomposer sons, odeurs, sensations de froid...
En relisant cet avis, je vois que je n’ai pas évoqué l’importance du thème de l’Autre : cet être intelligent, non humain, que l’on rencontre et dans la peau duquel on entre, pour découvrir tout un pan de la mythologie de Gemma, de son histoire… et surtout pour comprendre le principe d’altérité et s’ouvrir à une autre conscience, au-delà de l’humanisme.
Un roman très riche, donc, que je ne manquerai pas de relire pour en apprécier davantage les détails – portée par le suspense, j’ai lu les 400 dernières pages en moins de 24 heures… Un régal.

Bonus
Sur le site dédié à la trilogie http://quantika-sf.com, on découvre non seulement le résumé de chaque tome, ainsi que des extraits à lire et lus, mais aussi la bande-son dont de la musique venue d’Inde (très importante pour un des personnages), des illustrations de l’auteur (la trilogie était à l’origine un projet de BD), des vidéos… Une multitude de facettes à l’image des talents de l’auteure.

Interview de Laurence Suhner par Actu SF :
« QuanTika a toujours été pour moi un mélange d’images, de textes et de sons. »

 

Chronique À l'ombre des nénuphars

Publié le 28 mai 2014

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