Ce roman court est un exercice virtuose de syncrétisme culturel, qui convoque de multiples références littéraires et cinématographiques occidentales en les mélangeant avec les contes et les croyances ancestrales rapportées d'Afrique par les esclaves

Ring Shout - Historia

Le cantique de la haine

Dans l'Amérique ségrégationniste des années 1920, La Naissance d'une nation, le film raciste de D. W. Griffith, additionné de magie noire, a transformé des membres du KuKlux Klan en monstres que Maryse, Sadie et Chef, guidées par une magicienne, traquent et tuent. Elles doivent à tout prix empêcher que la projection du film lors d'une séance nocturne en plein air engendre une armée de créature et un tsunami de violence à l'encontre des Noirs. La haine, c'est bien connu, ronge et déformé l'âme et le coeur. Chez Djèlí Clark, universitaire et romancier, elle est le carburant qui permet à des puissances maléfiques de transformer les hommes en monstres, ces "Ku Kluxes" directement sortis d'un film d'horreur, instruments de leur conquête mortifère. Dans l'éternel combat entre le bien et le mal, le beau sexe se taille la part du lion, car c'est à des femmes d'action qu'il incombe de préserver l'humanité. Ring Shout est en somme une sorte de Buffy contre les vampires passé à la moulinette du folklore afro)américain. Plus généralement, ce roman court est un exercice virtuose de syncrétisme culturel, qui convoque de multiples références littéraires et cinématographiques occidentales en les mélangeant avec les contes et les croyances ancestrales rapportées d'Afrique par les esclaves, et notamment les rituels de la tradition gullah-geechee de Caroline du Sud et de Géorgie. Le tout dans une langue elle aussi mixte, entre prose classique et parler typique des descendants d'escalves. Il faut saluer ici la traductrice, qui a fait le choix d'un idiome de type créole pour des dialogues crédibles et hauts en couleur. Un cocktail détonnant qu'on n'oublie pas de sitôt !

 

Isabelle Mity

Publié le 1 octobre 2021

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