Olivier Bordaçarre a écrit Appartement 816 pendant le confinement, dans son logement clermontois. Ce roman D'anticipation nous emmène en 2030 : le système, sous prétexte de combattre un virus, empêche les gens de sortir de chez eux et même d'ouvrir leurs fenêtres...
Bien sûr, elle n'est pas folichonne, la vie de Didier Martin, mais enfin c'est comme ça.Il s'y est fait. Tout le monde s'y est fait d'ailleurs, de gré ou de force, à l'interdiction de sortir de chez soi, à l'interdiction d'ouvrir les fenêtres en dehors des heures programmées, à commander ses produits essentiels et à attendre la livraison des commandes de drones (sauf quand il y a pénuries), à faire sa déclaration quotidienne...
La compagnie des poissons exotiques
On est en 2030 et cela fait trois ans que les périodes d'IGT (Isolement général total) alternent avec les périodes d'IGP (Isolement général partiel), et Didier Martin ne s'en trouve pas si mal : c'est calme, le télétravail a ses avantages, et en étant ultra-connecté sur Rezo (le réseau social unique) toutes les démarches sont tellements simples ! Il est comptable, il aime l'ordre, le respect et préfère la compagnie des poissons exotiques à celle des humains...
Jour après jour, il va couvrir tous les murs, toutes les portes, étagères, placards, meubles, objets, du journal de cette vie rapetissée dans le logement qu'il habite avec sa femme et son fils. Appartement 816 (paru dans la collection noire des éditions L'Atalante en octobre dernier), est le neuvième roman d'Olivier Bordaçarre, dont le premier est paru en 2006 chez Fayard.
Cette année-là, le comédien-scénariste-dramaturge (mais aussi formateur, poète, peintre sans doute) est devenu écrivain pour de bon. D'un coup propulsé dans la cour des grands avec Géométrie variable, un livre sur le thème de l'abandon, de la recherche du père biologique.
Longtemps banlieusard parisien (depuis l'enfance et jusqu'en 2003), longtemps voyageur (avec femme et enfant), il partage maintenant sa vie entre Saint-Désiré, dans l'Allier et Clermont-Ferrand, où il travaille notamment avec la compagnie théâtrale de Dominique Freydefond et avec la compagnie de dans dAruma.
Et il écrit, écrit, réécrit – "le plaisir de retravailler le même texte, d'en faire quatre, cinq, six versions..." – de la politique-fiction, du polar noir, du thriller psychologique : La France tranquille en 2011; Dernier désir, en 2014 est un grand succès, et un projet d'adaptation pour le cinéma est actuellement en pourparler; Le sexe du ministre (en 2018, chez Phebus) s'est inspiré de l'affaire DSK...
Olivier Bordaçarre écrit à la loupe, à la pointe du scalpel et du diamant, aiguise la lame de son style millimétré. Il taille à vif, l'air de rien, le geste précis et la phrase dépecée, dans la chair crue de la société. Ça glace le sang et c'est terriblement beau.