Les Chroniques de l'Imaginaire

A dix sept ans, Quentin Coldwater désespère du monde ennuyeux où il vit, le nôtre, si éloigné de ce Fillory dont il a dévoré les Chroniques étant enfant, et où il a niché tous ses espoirs de bonheur. A défaut, toutefois, il a appris des tours de magie. De là à croire que la vraie magie existe... Il est pourtant admis - brillamment, comme d'habitude pour cet élève doué - à l'école de Brakebills, qui forme - en cinq ans - des magiciens, et dont, bien sûr, aucun "normal" ne connaît l'existence. Au moins y rencontrera-t'il des gens comme lui, et même son premier amour, et même des instants de bonheur. Mais là comme ailleurs, le bonheur ne dure pas.

Roman de l'adolescence perpétuellement en quête d'un Ailleurs, c'est là un roman initiatique et son opposé. On pourrait dire qu'il est au genre ce que Don Quichotte est aux romans de Chevalerie. En effet, si les ingrédients habituels sont réunis (une école de magie, une "compagnie" soudée de personnages différents du commun des mortels, une terre rêvée à atteindre, un monstre à défaire pour conquérir une couronne...), c'est pour mieux en ôter toute magie, si j'ose écrire : de l'école de Brakebills, on ne saura à peu près rien, les membres de la "compagnie" sont rassemblés par le hasard, et même pas par leurs talents particuliers, puisqu'on ne sait pas grand-chose de ceux de Quentin, et que de toute façon ça n'a d'importance pour personne, et tout à l'avenant. En quelque sorte, le jeu absurde et incompréhensible de la bourbasse est l'emblème de l'histoire.

Alors, roman de l'absurde essentiel (la recherche de sens ne débouche sur rien d'autre que la mort, ou sur une vie qui n'a pas plus de sens qu'auparavant), ou roman absurde ? En effet, il est difficile d'estimer si l'auteur a volontairement cherché ces effets, tant il y a de fils pendants, tant aussi, parfois, il se laisse emporter par la veine de la fantasy "classique" (le combat dans la caverne, par exemple), alors que l'écriture est "plate" pour d'autres épisodes (l'Antarctique).

Peut-être trop ambitieux pour un public adolescent, agaçant pour un adulte que ces histoires d'ados laissent de marbre, il peut pourtant plaire aux deux par son aspect intrigant et les questions et doutes mêmes qu'il soulève. J'ajouterai par ailleurs que la traduction de Jean-Daniel Brèque est somptueuse.

Ecrite par Mureliane

Publié le 11 octobre 2010

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