L'Espéragne est coupée en deux : au nord, les trois royaumes jaddites ; au sud, les multiples cités asharites. Dans chaque camp, on rêve de reconquérir la péninsule. À cette "grande histoire" pleine de complot se mêlent le destin de trois personnages charismatiques et de confession différente : Jehanne, femme-médecin kindath, Ammar, guerrier-poète-diplomate asharite et Rodrigo, guerrier jaddite au service de son roi.

Lire Guy Gavriel Kay, c'est toujours s'embarquer dans un véritable voyage. Tout est absolument envoutant : l'écriture, l'univers extrêmement riche et incarné, les personnalités des personnages. Ce n'est pas parce que l'inspiration historique se sent fortement (l'Espagne du IXe siècle, je crois) que l'auteur ne déploie pas énormément de détails concernant la religion, les cultures, la géopolitique, qu'il arrange bien sûr à sa sauce (on reste dans un monde imaginaire). C'est tellement beau, vivant et immersif qu'on n'a pas envie de s'en aller à la fin (et qu'il est un peu difficile de lire autre chose pendant un temps).

Surtout, ce niveau de détails permet à l'auteur de prôner la tolérance entre les religions et les cultures, de montrer à quel point il peut en résulter d'incroyables rencontres (comme celle de Rodrigo et Ammar) et de briser notre petit cœur de lecteurice quand tout ceci sera balayé par le fanatisme religieux. La force du roman est que jamais la "grande histoire" ne prend le pas sur la petite si bien que la fin fait partie de ces fins qui nous bouleversent entièrement. Il faudra que je la relise, d'ailleurs, car j'étais tellement en apnée que j'ai survolé les mots. Je voulais connaître la fin et pas la connaître à la fois.

[...] C'est vraiment une superbe lecture.