Le tour de force est d'allier un vibrant plaidoyer pour la tolérance (les massacres et les viols d'Orvilla résonnent avec ceux qui rongent notre monde, vous savez ? le vrai) au fracas des batailles et aux ardeurs du désir. C'est magistral.

Kay - Les Lions d'Al-Rassan - Science-Fiction Magazine

L'empire d'Al-Rassan a perdu son dernier khalife, assassiné par Ammar ibn Khairan. Du coup, ce territoire conquis par les Asharites (adorant les étoiles) a éclaté en cités-Etats et, au nord de la péninsule, les royaumes d'Espéragnes voués au culte de Jad (le soleil) entendent le reconquérir. Que va devenir ce pays où ont fleuri l'art et la science grâce au peuple errant, les Kindath, dans la tourmente politique et fanatique ?

Après le chef-d'oeuvre qu'était Tigane, Kay nous livre à nouveau un magnifique ouvrage, romanesque et épique, vaste, sensible et intelligent. Son univers de Fantasy est inspiré de contextes historiques précis (ici, la Reconquista espagnole), merveilleusement sensuel, et peuplé de figures inoubliables : Ammar, poète, assassin et diplomate, ou Jehane, jeune femme médecin prise entre l'obscurantisme et la haine ethnique d'un côté, et de l'autre l'engagement pour soulager la souffrance grâce au savoir... Pour eux, les choix personnels s'inscrivent dans les alliances politiques et stratégiques, à des carrefours de décision où leur vie bascule. Kay nous entraîne comme nul autre auteur de Fantasy dans les entrelacs de l'existence, dans son épaisseur qu'il dénoue, comme autant de voiles soyeux, de la voûte du ciel aux lits de l'amour.

Le thème central est moins fort que celui de Tigane mais le récit est peut-être plus efficace. Le tour de force est d'allier un vibrant plaidoyer pour la tolérance (les massacres et les viols d'Orvilla résonnent avec ceux qui rongent notre monde, vous savez ? le vrai) au fracas des batailles et aux ardeurs du désir. C'est magistral.

Stéphane Marsan, avril/mai 1999. 

Publié le 13 octobre 2017

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