En définitive, l’œuvre de Guy Gavriel Kay est à la fois une chronique sur un monde fascinant éteint depuis longtemps, mais aussi une réflexion sur les évolutions d’un monde en perpétuel mouvement.

Kay - Les Chevaux célestes - Les Singes de l'espace
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Dans chaque roman de Guy Gavriel Kay, il y a l’écho d’un poème. La douceur d’un monde qui se dévoile devant nous. La beauté d’une vie que quelques vers servent à nous décrire. Mais quand ce monde vit de poème, c’est tout un peuple qui s’illumine de ces quelques rimes pour nous envouter des légendes de ce pays à la frontière entre l’imagination et le réel.

Sous la IXe dynastie sous le ciel, Shen Taï, deuxième fils de l’illustre général Shen Gao de l’empire de Kitaï, s’est retiré durant les deux années officielles de son deuil dans les montagnes du Kuala Nor pour y enterrer les morts. C’est afin de le remercier de ce sacrifice que Cheng-Wan, princesse de jade blanc de l’empire du Tagur, lui a offert 250 chevaux célestes. Un présent inestimable et démesuré pour lui et son peuple, envieux de ses chevaux sardiens, que la Kitaï ne possèdent pas. Mais alors qu’il apprend cette nouvelle prompte à bouleverser son monde, Shen Taï se voit dans l’obligation de quitter le Kuala Nor à la rencontre de son empereur au sein des manigances de toute sa cour.

 

Il y a dans chacun des romans de Guy Gavriel Kay une tendresse, un rythme doux et envoutant. Tous sont teintés d’une mélancolie pour la beauté d’un monde ou la simplicité d’une vie. Et pour chacun d’eux nous sommes transportés, charmés parfois désabusés. Mais c’est toujours une myriade de sentiments qui s’offrent à nous pour nous faire vivre pleinement l’histoire de ses personnages et de ces peuples.

Dans Les chevaux Célestes, cette douceur ne fait pas défaut. L’auteur nous raconte l’histoire de la dynastie des Tangs, au VIIe siècle de notre ère. Amoureux des cultures, Guy Gavriel Kay nous replonge dans ce qui fut la grandeur de cette dynastie, qu’il reprend à son compte dans un roman de fantasy. Habitué du genre, et maître en la matière, il évoque des personnages historiques pour en refaire les héros de son roman. Et c’est avec un talent qu’il n’a plus à nous prouver qu’il nous fait revivre cette époque entre ses traditions, sa culture et ses conflits. Il nous livre les arcanes d’un pouvoir plongé dans des querelles internes, où chacun joue l’équilibre d’un monde pour des ambitions personnelles. Et à travers ces conflits, chaque personnage qui a fait la grandeur de cette dynastie revit sous la plume de l’auteur [...]. Nous nous attachons irrémédiablement à ces personnages pour leur caractère parfois piquant ou extravaguant mais toujours bienveillant.Il y a attachement réel pour chacun d’eux, un lien qui nous unit et nous fait vivre à leur coté le temps le long du roman.

[...] Dans ces décors majestueux, entre les grandes plaines solitaires au delà de la Grande Muraille et le tumulte incessant des villes de la Kitaï, Guy Gavriel Kay nous plonge dans un monde somptueux aussi diversifié que fascinant. Mais il nous invite également à réfléchir sur notre vie. “Une époque est toujours trouble pour celui qui la vit”. C’est notamment à travers ces mots, que l’auteur nous questionne sur la place de chacun dans ce monde et la perception des faits historiques au regard de celui qui les vit. Mais GGK nous rappelle également à quel point les chroniques et poèmes d’une époque peuvent moduler l’Histoire. Celle-ci appartient aux gagnants et pour chaque événement, ces derniers les content à leur image pour en faire la version de tout un peuple.

En définitive, l’œuvre de Guy Gavriel Kay est à la fois une chronique sur un monde fascinant éteint depuis longtemps, mais aussi une réflexion sur les évolutions d’un monde en perpétuel mouvement.

Dans un autres romans que j’affectionne l’un des personnages nous dit que “Le lecteur vit mille vies dans une vie. L’homme qui ne lit pas n’en vie qu’une*”. Et c’est une autre vie que j’ai vécue avec GGK. C’est une autre vie qui s’est achevée avec les dernières pages de ce majestueux roman.

LineTje - 02 février 2015

Publié le 2 mars 2015

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