La vengeance est une tradition familiale. » Le prologue est dur comme Adrienne. La vieille, celle qui veille aux destinées du Chais en ces années de guerre 14-18. Cette dernière phrase du prologue planera tout au long de ce Narcogenèse, le troisième roman d'Anne Fakhouri dont seul le titre paraît incongru, naïvement moderniste ou racoleur. Mais oublions le titre et restons-en au roman. C'est une réussite totale. Ce thriller fantastique est formidablement mené. Très cinématographique : des plans-séquences courts, des flash-backs mystérieux, des personnages forts, auxquels ont croit. Dans cette petite ville, des enfants disparaissent, d'autres tombent dans le coma. Zette peut pénétrer dans leurs rêves, ou leurs cauchemars, habités par un Marchand de sable cruel. Pourquoi ? Comment ? Et qu'ont à y voir la vieille Claude et ses filles, Diane et Louise, dite Zette, les habitantes actuelles du Chais, avec les deux enfants de Diane, Lucie et Max. Simon Larcher est le flic qui enquête. Parce qu'un des enfants disparus est retrouvé dans le parc du Chais... Anne Fakhouri, 37 ans, professeur de français, avait déjà écrit Le clairvoyage et sa suite La brume des jours (L'Atalante), deux romans jeunesse applaudis. Avec ce Narcogenèse, elle s'adresse aux adultes. Car le roman est dur, cruel et convoque les peurs enfantines qui nous hantent toujours. Les enfants qui n'existent pas « Ce roman est à la fois l'enquête très rationnelle d'un flic, explique Anne Fakhouri, et l' enquête surnaturelle d'une infirmière qui a un don particulier : elle peut aller dans le rêves des gens qui sont dans le coma pour leur faire réaliser que le monde des rêves n'est pas le bon et qu'ils doivent choisir entre la vie et la mort. Il y a toujours la famille tentaculaire qui revient dans mes romans, la transmission et évidemment les peurs enfantines et la place que chacun a dans le monde, qui reste un de mes thèmes favoris. » Adrienne, comme Mamia plus tard puis Claude sont des femmes extrêmement fortes qui servent avant tout les ambitions de la famille, l'argent mais aussi la défense de la lignée. Mais une lignée féminine de facto puisque les femmes ont un don que les hommes n'ont pas. « Ce livre est né de deux choses. D'abord je me suis beaucoup interrogé sur la maternité depuis la naissance de ma première fille il y a 5 ans. J'ai été stupéfié par la mode du naturalisme où la mère est sanctifiée. Et puis il y a l'affaire Courgeau, qui a montré qu'il ne suffisait pas de maîtriser la fertilité pour se sortir des pulsions de violence et du chaos psychologique que peut être la maternité pour certaines femmes. Un jour en écoutant les infos sur l'affaire Courgeau (cette femme qui avait tué et congelé ses bébés), j'ai entendu qu'elle disait qu'elle n'avait pu tuer ses enfants puisqu'ils n'existaient pas. Et je me suis demandé où vont les enfants qui n'existent pas pour les parents. Non seulement ceux qu'on nie in utero mais aussi les maltraités, les abandonnés : où vont-ils, comment se construisent-ils ? » Narcogenèse parle en effet de ces enfants-là. Et de leurs mères. Anne Fakhouri le fait en racontant superbement une incroyable histoire et en suscitant nos réflexions. C'est une nouvelle voix, forte, dans les littératures de l'imaginaire. JEAN-CLAUDE VANTROYEN - Le Soir

Fakhouri - Narcogenèse - LE SOIR

La vengeance est une tradition familiale. » Le prologue est dur comme Adrienne. La vieille, celle qui veille aux destinées du Chais en ces années de guerre 14-18. Cette dernière phrase du prologue planera tout au long de ce Narcogenèse, le troisième roman d'Anne Fakhouri dont seul le titre paraît incongru, naïvement moderniste ou racoleur. Mais oublions le titre et restons-en au roman. C'est une réussite totale. Ce thriller fantastique est formidablement mené. Très cinématographique : des plans-séquences courts, des flash-backs mystérieux, des personnages forts, auxquels ont croit.

Dans cette petite ville, des enfants disparaissent, d'autres tombent dans le coma. Zette peut pénétrer dans leurs rêves, ou leurs cauchemars, habités par un Marchand de sable cruel. Pourquoi ? Comment ? Et qu'ont à y voir la vieille Claude et ses filles, Diane et Louise, dite Zette, les habitantes actuelles du Chais, avec les deux enfants de Diane, Lucie et Max. Simon Larcher est le flic qui enquête. Parce qu'un des enfants disparus est retrouvé dans le parc du Chais...

Anne Fakhouri, 37 ans, professeur de français, avait déjà écrit Le clairvoyage et sa suite La brume des jours (L'Atalante), deux romans jeunesse applaudis. Avec ce Narcogenèse, elle s'adresse aux adultes. Car le roman est dur, cruel et convoque les peurs enfantines qui nous hantent toujours.

Les enfants qui n'existent pas

« Ce roman est à la fois l'enquête très rationnelle d'un flic, explique Anne Fakhouri, et l' enquête surnaturelle d'une infirmière qui a un don particulier : elle peut aller dans le rêves des gens qui sont dans le coma pour leur faire réaliser que le monde des rêves n'est pas le bon et qu'ils doivent choisir entre la vie et la mort. Il y a toujours la famille tentaculaire qui revient dans mes romans, la transmission et évidemment les peurs enfantines et la place que chacun a dans le monde, qui reste un de mes thèmes favoris. »

Adrienne, comme Mamia plus tard puis Claude sont des femmes extrêmement fortes qui servent avant tout les ambitions de la famille, l'argent mais aussi la défense de la lignée. Mais une lignée féminine de facto puisque les femmes ont un don que les hommes n'ont pas.

« Ce livre est né de deux choses. D'abord je me suis beaucoup interrogé sur la maternité depuis la naissance de ma première fille il y a 5 ans. J'ai été stupéfié par la mode du naturalisme où la mère est sanctifiée. Et puis il y a l'affaire Courgeau, qui a montré qu'il ne suffisait pas de maîtriser la fertilité pour se sortir des pulsions de violence et du chaos psychologique que peut être la maternité pour certaines femmes. Un jour en écoutant les infos sur l'affaire Courgeau (cette femme qui avait tué et congelé ses bébés), j'ai entendu qu'elle disait qu'elle n'avait pu tuer ses enfants puisqu'ils n'existaient pas. Et je me suis demandé où vont les enfants qui n'existent pas pour les parents. Non seulement ceux qu'on nie in utero mais aussi les maltraités, les abandonnés : où vont-ils, comment se construisent-ils ? »

Narcogenèse parle en effet de ces enfants-là. Et de leurs mères. Anne Fakhouri le fait en racontant superbement une incroyable histoire et en suscitant nos réflexions. C'est une nouvelle voix, forte, dans les littératures de l'imaginaire.

JEAN-CLAUDE VANTROYEN - Le Soir

Publié le 14 juin 2011

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