Vous l'avez compris, voici le roman à lire en ce début d'année, d'autant plus qu'il est servi par une couverture superbe - une planche anatomique de dragon ! - de Todd Lockwood qui a aussi signé les beaux dessins à l'intérieur du livre. L'attente va être longue jusqu'à la sortie prévue à l'automne du tome 2 puis des autres car, Dieu merci, lady Trent a vécu une longue vie.

Brennan - Une histoire naturelle des dragons - Actusf
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Il arrive, de temps en temps, de découvrir un nouvel auteur et d'être enthousiasmé par son talent. Grâce à L'Atalante, cela a été le cas pour moi en dévorant d'une traite entre le samedi soir et les premières lueurs de l'aube le dimanche matin Une histoire naturelle des dragons. Mémoires, par lady Trent de Marie Brennan. Il s'agit là, comme le sous-titre l'indique, du premier volume des mémoires d'une vieille lady non conformiste car devenue naturaliste, spécialisée dans les dragons et abordant même quasi ouvertement des questions délicates comme celles de la reproduction... Inutile de préciser que nous sommes dans un monde légèrement différent du nôtre mais où le Scirland des années 5600, pays où est née dans une famille de la bonne société Isabelle Hendemore, la future lady Trent, ressemble furieusement à l'Angleterre victorienne et où donc une jeune femme ne peut montrer d'intérêt pour autre chose que la broderie puis la chasse au mari et enfin la tenue de son ménage entre deux bals et activités charitables... Isabelle nous raconte son enfance, la passion pour la zoologie qu'elle a développé dès l'âge de sept ans, en particulier pour les dragons (car il vit beaucoup de dragons, de toutes sortes, dans les pays plus ou moins éloignés) à travers l'étude des lucions, ces mini-dragons communs dans les jardins et les champs. Elle nous conte aussi la chance qu'elle a eu d'avoir un père cultivé et ses manoeuvres pour lui faire acheter "Une histoire naturelle des dragons", l'ouvrage de référence écrit par sir Richard Edgeworth. Nous la suivrons dans ses débuts dans la société de la capitale, Falchester, à l'âge tendre de dix-sept ans pour se trouver un mari sans effrayer les candidats possibles par ses intérêts peu féminins et son mariage avec Jacob Camherst puis sa participation à sa première expédition, dans les montagnes sauvages de cette contrée arriérée et hostile qu'est la Vystranie mais qui grouille de dragons. Tout le roman, écrit à la manière des mémoires et des récits de naturalistes du XIXème siècle, est un bijou d'humour pince-sans-rire (rendu fort bien par Sylvie Denis à qui cela a dû rappeler un autre auteur qu'elle a traduite, Gail Carriger) qui démontre la culture de Marie Brennan et sa familiarité, étant elle-même spécialisée en archéologie, anthropologie et folklore, avec le style de l'époque. Isabelle est un personnage attachant par sa révolte contre les usages de sa société et sa manière de les contourner, avec l'aide de son sympathique et amoureux mari et de lord Hilford, spécialiste des dragons, naturaliste de renom mettant le savoir et la passion dragonesques au-dessus de tout. Quant à toute la partie se déroulant à Drustanev, le village perdu au milieu des montagnes où l'expédition va se rendre, outre la manière parfaite dont est décrite l'évolution et le mûrissement d'Isabelle, devenant une vraie femme de tête menant l'enquête face à l'adversité, les réflexions sur le caractère des habitants, les moeurs du pays, l'économie et la politique, donnent un caractère d'authenticité hallucinant au livre (sans compter, m'a-t-il semblé, quelques clins d'oeil à des films d'Universal et de la Hammer...) et nous nous posons avec Isabelle des questions sur les ruines monumentales laissées par cette civilisation draconienne inconnue et disparue à la surface du monde. Vous l'avez compris, voici le roman à lire en ce début d'année, d'autant plus qu'il est servi par une couverture superbe - une planche anatomique de dragon ! - de Todd Lockwood qui a aussi signé les beaux dessins à l'intérieur du livre. L'attente va être longue jusqu'à la sortie prévue à l'automne du tome 2 puis des autres car, Dieu merci, lady Trent a vécu une longue vie.

Jean-Luc Rivera - Actusf

Publié le 2 mars 2016

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