Jean-Claude Dunyach nous offre ainsi un space opera bien original et une réflexion sur la différence, la communication, l’entraide. Avec son style habituel, riche, cinématographique et sensoriel.

Trois hourras pour lady Évangeline - Le Soir

Evangeline est une rebelle. A 16 ans, peut-on être autrement ? Son père est ambassadeur plénipotentiaire. Diplomate chevronné, guindé, stratège. Elle le rejette. Il la néglige. Entre eux, c’est l’incompréhension. Le roman de Jean-Claude Dunyach est d’ailleurs entièrement basé sur les difficultés de communication. Entre deux êtres proches, entre deux espèces. Tout au long de ce court roman haletant, drôle et profond à la fois, les personnages sont confrontés aux impossibilités de comprendre et de se faire comprendre.

Très loin dans l’espace, l’homme est confronté à un ennemi inhabituel. Un être éparpillé en milliards de composants individuels, un nuage de particules dérangé dans sa lente dérive inconsciente lorsque le vaisseau Le Temps incertain émerge de l’espace-Tau au voisinage de la planète Esmeralda. Les jets de propulsion des tuyères désintègrent des millions de ces particules. Les autres sortent de leur léthargie et réagissent. En quatorze heures, le Temps incertain est mort. Et le nuage a grandi, pris un semblant de conscience, prêt à dévorer autre chose. Les installations humaines de la planète Esmeralda peut-être…
C’est cet ennemi dangereux et insaisissable que doit combattre l’homme. Comment ? Comment tenter d’abattre ce qui est incommensurable, ce qui ne communique pas, ce qui n’entend rien ? Pour le bien de l’humanité, il faudra quand même bien trouver des solutions. Et, le titre du roman nous le dit, c’est bien Evangeline, devenue Lady Evangeline, qui va tirer l’humanité d’affaire. Avec une poignée de soldat.e.s prêts à affronter n’importe quel ennemi pourvu que ce soit avec elle.
Car Evangeline est une survivante. Seule rescapée du camp d’Enertia, elle est confrontée à des essaims d’insectes sociaux, voraces et gluants. Elle ne peut pas faire face à cet adversaire, alors elle va les utiliser. D’abord comprendre comment la ruche fonctionne, ensuite s’adapter à elle puis en devenir maître. C’est-à-dire s’en faire la reine. Ce qui nécessite des adaptations de l’esprit, du langage (elle parvient à maîtriser les clics des chitineux et à assimiler la langue des phéromones) et du corps. Evangeline se transforme. Nourrie par le nectar des ouvrières, elle grossit, se déforme, perd une partie de son humanité. Sauf que son esprit reste clair.

Et quand, par un concours d’aventures et de péripéties passionnantes, elle va retrouver le chemin du vaisseau de son père et participer à la guerre contre cet amas de particules pour sauver des milliers sinon des milliards d’êtres humains, c’est elle qui va trouver le moyen de les combattre. Parce qu’elle a su s’adapter aux insectes, elle pourra comprendre en partie ces insaisissables ions.
Jean-Claude Dunyach nous offre ainsi un space opera bien original et une réflexion sur la différence, la communication, l’entraide. Avec son style habituel, riche, cinématographique et sensoriel.

Jean-Claude Vantroyen

Publié le 5 novembre 2019

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