L’espace n’est pas un milieu sain et sans risque dans Trois hourras pour lady Évangeline
Les dangers y sont multiples comme le vaisseau Le Temps incertain va le découvrir à ses dépens, en émergeant à proximité de la planète Esmeralda. Il va ainsi croiser la route d’un ennemi inconnu, un nuage de particules qui va détruire le vaisseau militaire dans son intégralité puis s’attaquer aux habitants de la planète. Une guerre commence ainsi face à un ennemi effrayant, redoutable et très puissant, dont on ne sait rien. Des militaires sont expédiés au cœur du conflit, accompagnés d’un ambassadeur, père d’une jeune fille prénommée Évangeline. Cette dernière vient d’être envoyée sur une planète école pour poursuivre ses études loin de ses parents et des multiples tentations du monde. Évangeline va ainsi rencontrer un ennemi d’un autre genre : une ruche d’insectes hostiles, dévorant et recyclant tout ce qu’ils trouvent sur leur route. L’adolescente va devoir trouver des moyens insoupçonnés pour survivre. Évangeline et son père sont ainsi confrontés à deux ennemis très différents : des insectes gluants et voraces dont le but est de faire survivre la ruche et un ennemi inconnu, dangereux et implacable.
Évangeline confrontée à une race d’insectes hors normes va devoir se battre pour survivre. Pas par la manière forte, comme dans Alien, dont le roman a parfois de faux airs. Elle va devoir utiliser une autre tactique, et comprendre comment la ruche fonctionne et s’adapter à elle. La jeune fille devra ainsi se transformer en quelque chose d’autre. Le thème de l’évolution est au centre du roman, l’évolution pour survivre, la transformation du corps que vit tout adolescent et à laquelle Évangeline va devoir faire face. Cependant, il est aussi question de survie à plus grande échelle : la survie des militaires envoyés combattre le nuage de particules, puis la survie de milliers d’humains...
Pour rester en vie, il faut comprendre son ennemi, ses désirs, ses volontés. Si Évangeline arrive à connaitre les insectes, les militaires eux ne savent rien de leur ennemi, et n’ont aucun moyen de communiquer avec lui. Il n’est déjà pas facile de traiter avec quelqu’un dont on parle le langage mais quand on se trouve face à un mur d’incompréhension, la tache devient impossible. L’incompréhension est aussi au centre du roman : incompréhension face à l’ennemi, incompréhension entre Évangeline et son père. Quand le langage devient impuissant, il faut trouver d’autres moyens de communiquer, les odeurs, les sons. Jean-Claude Dunyach a ainsi enrichi son récit d’une dimension physique, en donnant beaucoup d’importance aux odeurs en particulier (avec les sécrétions corporelles, les phéromones) et à tout ce qui est sensoriel. Cette dimension est importante et permet de mieux visualiser les choses, de mieux s’immerger dans cet univers. Elle est mise en valeur par la richesse du style de l’auteur.
Trois hourras pour Lady Évangeline est un roman court, très rythmé qui met les héroïnes en valeur. Un roman qui traite de la différence, de l’incompréhension, de l’entraide nécessaire à la survie, de la communication avec autrui à tous les sens du terme. Un roman brillamment construit que l’on peut lire à plusieurs niveaux.