Kra transcende à la fois la fantasy et le roman animalier pour les fondre en une fresque flamboyante.

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Le monde vu par un oiseau… Dar Duchesne est une corneille. Son royaume, Kra, s’étend au-dessus et à coté de l’Ymr, celui des humains. Un jour, blessée, elle est recueillie par un homme, un veuf survivant dans un monde dévasté par la pollution. Oiseau exceptionnel (elle est immortelle et peut communiquer avec les hommes), Dar Duchesne va raconter l’histoire de l’humanité, qu’elle a suivie de haut, et sa solitude à elle, première de sa race à ne pas mourir et à porter un nom. Ce point de vue décalé mène à une réflexion sur l’histoire humaine que l’Américain John Crowley nourrit de mythologie (Gilgamesh et Orphée comme les légendes amérindiennes), truffe de références, salue de clins d’oeil et éclaire de comparaisons avec le monde parallèle des corbeaux, reflet de nos errances. Roman exigeant, mêlant les époques et les croyances, riche jusqu’à parfois perdre son lecteur, Kra transcende à la fois la fantasy et le roman animalier pour les fondre en une fresque flamboyante. Vue par les yeux d’un passeur, chair vivante qui se nourrit de cadavres, cette épopée souvent macabre remet la mort à sa vraie place : la première. La seule qui, en les rendant fragiles, parvient à donner du sens à nos vies, ailées ou non.

Hubert Prolongeau

Publié le 25 septembre 2020

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