Réalité alternée Ceci n’est pas un jeu se situe dans un avenir qui n’est guère éloigné de notre présent. L’héroïne, Dagmar, a en effet pour métier de concevoir des "jeux en réalité alternée". Aujourd’hui très en vogue aux Etats-Unis, ces jeux multimédias se déroulent surtout en ligne, sur Internet, mais comportent une partie de jeu de piste, les joueurs allant chercher des indices dans la vie réelle. Et puis les crises financières sont toujours là: en proie aux émeutes et à la violence à la suite de l’effondrement de sa roupie sur les marchés, l’Indonésie s’isole du monde ; Dagmar, en voyage pour Bali, est bloquée à son escale de Jakarta. Malgré son passeport américain, pour sortir du pays, elle doit recourir à la fois aux services d’une officine de sécurité payée par un ami financier et à l’aide des réseaux mobilisés par ses correspondants internautes. De retour en Californie, elle constate que d’autres monnaies font l’objet de spéculations massives et destructrices. Elle découvre aussi que les trois camarades d’université avec lesquels elle a fait un temps équipe – son ami financier, son patron et un programmeur qui a été un temps son compagnon – ne sont peut-être pas étrangers à ces opérations. L’un d’eux est abattu sous ses yeux par un tueur de la mafia russe. Elle se lance dans une enquête sur ce meurtre, qui la met sur la piste des spéculateurs. Elle intègre une partie de ses recherches dans le jeu en réalité alternée qu’elle est en train de mettre en scène, et bénéficie ainsi de l’aide plus ou moins volontaire des participants. Ceux-ci vont identifier le meurtrier dans l’heure qui suit son forfait et le titulaire final d’un compte dans un paradis fiscal. L’intrigue ne manque pas de rebondissements. Les personnages – le quatuor central comme les internautes – sont dessinés à grands traits et bien typés. Le suspense est maintenu jusqu’au bout. Walter Jon Williams est un auteur assez éclectique. Il a abordé avec succès la plupart des genres des littératures de l’imaginaire. Il met ici en lumière les potentialités extraordinaires des nouvelles technologies de l’information, pour le meilleur et pour le pire. On mesure bien les risques que les programmes informatiques de "trading" automatique peuvent faire peser sur les marchés, compte tenu de la capacité quasi illimitée d’accumulation de données, de calcul, et de simulation des ordinateurs. Ne serait-il pas possible que soient un jour conçus des programmes pour déstabiliser, par l’intermédiaire des marchés, des entreprises, des économies nationales, voire des gouvernements, si des moyens financiers suffisants étaient mobilisés ? Mais, d’un autre côté, les réseaux qui se constituent sur Internet peuvent rassembler des centaines de milliers, voire des millions d’internautes répartis dans le monde entier. A l’heure de la globalisation, n’ouvrent-ils pas la possibilité d’informer hommes et femmes de tous les pays des problèmes de notre planète et de mobiliser les bonnes volontés pour les traiter? Michel Pébereau, Samedi 27 Février 2010, www.lejdd.fr

Williams - Ceci n'est pas un jeu - Le Journal du Dimanche

Réalité alternée

Ceci n’est pas un jeu se situe dans un avenir qui n’est guère éloigné de notre présent. L’héroïne, Dagmar, a en effet pour métier de concevoir des "jeux en réalité alternée". Aujourd’hui très en vogue aux Etats-Unis, ces jeux multimédias se déroulent surtout en ligne, sur Internet, mais comportent une partie de jeu de piste, les joueurs allant chercher des indices dans la vie réelle. Et puis les crises financières sont toujours là: en proie aux émeutes et à la violence à la suite de l’effondrement de sa roupie sur les marchés, l’Indonésie s’isole du monde ; Dagmar, en voyage pour Bali, est bloquée à son escale de Jakarta. Malgré son passeport américain, pour sortir du pays, elle doit recourir à la fois aux services d’une officine de sécurité payée par un ami financier et à l’aide des réseaux mobilisés par ses correspondants internautes. De retour en Californie, elle constate que d’autres monnaies font l’objet de spéculations massives et destructrices. Elle découvre aussi que les trois camarades d’université avec lesquels elle a fait un temps équipe – son ami financier, son patron et un programmeur qui a été un temps son compagnon – ne sont peut-être pas étrangers à ces opérations. L’un d’eux est abattu sous ses yeux par un tueur de la mafia russe. Elle se lance dans une enquête sur ce meurtre, qui la met sur la piste des spéculateurs. Elle intègre une partie de ses recherches dans le jeu en réalité alternée qu’elle est en train de mettre en scène, et bénéficie ainsi de l’aide plus ou moins volontaire des participants. Ceux-ci vont identifier le meurtrier dans l’heure qui suit son forfait et le titulaire final d’un compte dans un paradis fiscal. L’intrigue ne manque pas de rebondissements. Les personnages – le quatuor central comme les internautes – sont dessinés à grands traits et bien typés. Le suspense est maintenu jusqu’au bout. Walter Jon Williams est un auteur assez éclectique. Il a abordé avec succès la plupart des genres des littératures de l’imaginaire. Il met ici en lumière les potentialités extraordinaires des nouvelles technologies de l’information, pour le meilleur et pour le pire. On mesure bien les risques que les programmes informatiques de "trading" automatique peuvent faire peser sur les marchés, compte tenu de la capacité quasi illimitée d’accumulation de données, de calcul, et de simulation des ordinateurs. Ne serait-il pas possible que soient un jour conçus des programmes pour déstabiliser, par l’intermédiaire des marchés, des entreprises, des économies nationales, voire des gouvernements, si des moyens financiers suffisants étaient mobilisés ? Mais, d’un autre côté, les réseaux qui se constituent sur Internet peuvent rassembler des centaines de milliers, voire des millions d’internautes répartis dans le monde entier. A l’heure de la globalisation, n’ouvrent-ils pas la possibilité d’informer hommes et femmes de tous les pays des problèmes de notre planète et de mobiliser les bonnes volontés pour les traiter?

Michel Pébereau, Samedi 27 Février 2010, www.lejdd.fr

Publié le 1 mars 2010

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