Williams - Ceci n'est pas un jeu - Actusf
Auteur des séries
Câblé et
Majistral, et du cycle de science-fiction La
chute de l’empire Shaa, Walter Jon Williams a reçu plusieurs prix Nebula
pour ses nouvelles et a été nominé plusieurs fois pour le prix Hugo.
Figure de proue du cyberpunk, il signe avec
Ceci n’est pas un jeu un
roman avant-gardiste sur le thème du jeu de rôle dystopique.
Alors que les économies de plusieurs pays s’effondrent, Dagmar se
demande si la société pour laquelle elle travaille ne pourrait pas y
être pour quelque chose. Elle est conceptrice d’ARG, des jeux en réalité
alternée, dans lesquels les joueurs n’évoluent non pas sur Internet
mais dans la réalité pour résoudre des énigmes. Lorsqu’un assassin s’en
prend à son entourage, elle mobilise ses joueurs dans un faux-vrai jeu
pour retrouver le meurtrier. Mais quand le frontière entre réalité et
fiction est ténue, le jeu peut devenir très dangereux...
Ceci n’est pas de la science-fiction
Walter Jon Williams s’engage avec Ceci n’est pas un jeu dans une
science-fiction subtile. L’histoire se déroule dans un futur très proche
(aucune date ne peut nous fournir d’indice), les technologies dont il
est question existent bel et bien, même si les ARG n’ont pas encore
vraiment frappé l’Europe (Walter Jon Williams est le scénariste d’un ARG
aux Etats-Unis). L’envergure donnée au concept, en revanche, est
résolument cyberpunk. Williams nous immerge brutalement au coeur d’un
panorama apocalyptique, dans une Indonésie en proie à un cataclysme
financier monstre dont on peut sans problème deviner la cause (même si
ce n’est pas clairement établi au début du roman, le spectre de la
cyberattaque plane comme une ombre sur les premiers chapitres). Le style
de Williams a la fluidité d’un
Câblé et l’impact visuel de la
Mélancolie des Immortels. L’immersion est totale, mais le récit reste
malgré tout très accessible. Et prépare le terrain pour la seconde
partie du roman.
Ceci n’est pas un jeu de rôle
Lorsque l’héroïne revient à Los Angeles, le roman bascule dans un ARG à
part entière. Le lecteur et les rôlistes sont conviés à une cybertraque
sur fond de traficotages boursiers et de manigances d’une grosse société
américaine, avec en filigrane un rêve américain vacillant, prêt à
s’effondrer avec le dollar... On appréciera chez Walter Jon Williams ce
sens aigu du suspense et du clockticking (qui consiste à donner au
lecteur l’impression que le temps est compté pour les personnages). Les
péripéties s’enchaînent, dans la réalité comme dans le cyberespace,
l’univers est rendu encore plus crédible par l’intervention de joueurs
au hasard des chapitres. Cette seconde partie de l’histoire réserve des
surprises de taille, on y retrouve une héroïne accablée et des coups de
théâtre à la Michael Crichton, ainsi qu’une résolution magistrale à cet
excellent opus.
En attendant une éventuelle suite, régalez-vous du talent de Walter Jon
Williams, conteur d’histoires hors pair et maître incontesté du genre !
Julien Morgan
Actusf
Publié le 7 mai 2010