Je ne rate jamais l’occasion d’un petit voyage en Grèce, même s’il s’agit d’un roman policier. À travers la résolution d’une énigme, nous pénétrons dans les arcanes du pouvoir, politique ou financier. L’auteur va démonter les rouages cachés de la société.
Nicolas Verdan est un écrivain et journaliste suisse francophone (vaudois) qui connaît bien la Grèce. Le Mur Grec, paru d’abord en 2015 a été réédité en 2022.
L’action se déroule pendant la Crise dans les années 2010. L'Agent Evangelos, proche de la retraite, est nostalgique des années anciennes où l’on fumait dans les bars, est assez désabusé. La Troika et l’Union européenne qui met en tutelle la Grèce sont assez mal ressentis.
On l’appelle pour une affaire étrange : on a trouvé une tête coupée sur les bords de l’Evros – fleuve frontière entre la Turquie et la Grèce, qu’on appelle Maritsa en Bulgarie. Cette frontière est très sensible : lieu de passage terrestre des migrants surveillé par Frontex.
La tête ne correspond pas à celle d’un migrant, plutôt à quelqu’un qui aurait les moyens de payer un très bon dentiste. L’Agent Evangelos prend l’avion pour Alexandroupoli. Je suis ravie de le suivre en Thrace ou nous avons passé des vacances en 2013, région oubliée des touristes très authentique et originale. Au fil des pages je retrouve Xanthi, les Rhodopes, les Pomaks et la via Egnatia. Souvenirs aussi de lectures de Lisières de Kapka Kassabova.
Image d’autant plus relevante que la tête coupée a été trouvée près d’un bordel fréquenté par les soldats de Frontex où se déroulaient d’étranges bacchanales.
Ne nous attardons pas trop dans la poésie lyrique. Cette enquête est plutôt classique avec des politiques opportunistes décidés à exploiter l’affaire pour mettre l’Union européenne dans l’embarras, des appels d’offre truqués pour la construction d’un mur (des barbelés) destiné à contenir les migrants. Le voilà le fameux Mur Grec qui donne le titre du livre... Mais ne spoilons pas!
L’Agent Evangelos a peu d’états d’âme. Il sait qu’il ne trouvera pas la justice, juste un peu de la vérité alors qu’on lui conseille de laisser tomber.
C’est un bon polar qui se lit vite, lecture facile, addictive. Vous n’y trouverez pas de folklore grec. Ce n’est pas la Grèce pour touristes (sauf l’hôtel dans l’Imaret de Kavala, magnifique !).