On peut également y voir un avertissement sur la société que nous sommes en train de bâtir, sur la trop grande importance que nous accordons au virtuel. Ce n'est plus la religion qui est l'opium du peuple, mais le numérique.

Numérique - Les chroniques de l'Imaginaire
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Ce tome 2 peut être lu de façon totalement indépendante du premier. Il n'y a pas de suite dans l'histoire. Ce ne sont pas les mêmes personnages, pas le même univers. Seul point commun : le lieu où les événements se passent, c’est-à-dire en Russie.

Arsène est un jeune adolescent de quatorze ans accro aux jeux de rôle : un gameur. Dans son jeu préféré, Bal Royal, il est Ministre, et aujourd'hui est un jour important car il va enfin voir le résultat de toute sa stratégie minutieusement mise en place au fil des mois, et prendre le pouvoir.

Mais ses parents ne voient pas les choses de la même façon. Inquiets de voir leur fils passer autant de temps sur son ordinateur, et après avoir été avertis par le lycée que le jeune garçon manquait les cours régulièrement, ils profitent de son départ à l'école (départ-comédie car Arsène a l'habitude de revenir à la maison après le départ de ses parents au travail pour jouer en réseau) pour vider sa chambre de tout son équipement informatique.

Lorsque Arsène revient, c'est la catastrophe. Le voilà contraint de trouver un cybercafé pour que Ministre puisse prendre le pouvoir lors de la cérémonie qui doit avoir lieu le soir même. C'est dans ce cybercafé que l'adolescent est abordé par un homme étrange, Maxime.

Maxime connait Arsène, connait ses qualités de jeu, de décision, il sait que le jeune homme est un phénomène. Il lui propose alors une affaire singulière : participer à des sélections pour être embauché dans son entreprise éditrice des jeux vidéos du futur. Le contrat parait en béton, Arsène gagnera de l'argent, beaucoup. Ses parents sont rassurés et acceptent.

Commence alors une période pendant laquelle le jeune garçon va s'affronter dans différents jeux avec d'autres candidats. Mais il se rend vite compte que les jeux en question ne sont pas innocents. Le premier, par exemple, fait passer des messages subliminaux et Arsène se retrouve, dans sa chambre individuelle, à manger une quantité énorme de yaourts. Il comprend alors que le jeu avait pour unique but de le manipuler. Ses camarades seront soumis eux aussi à d'autres tentations comme la bière par exemple. Au fur et à mesure des tests, les profils des candidats s'affinent. Arsène est fasciné par Anya, une jeune femme d'une vingtaine d'années, gameuse exceptionnelle elle aussi.

La première partie du roman raconte ces étapes de sélection à travers des jeux. Puis, le roman va prendre une autre direction et rentrer dans le vif du sujet, à savoir le numérique et la manipulation.

Suite à différents événements, Arsène comprend que Maxime n'est pas ce qu'il prétend être, il est un être bien plus puissant qu'il ne parait. Ses capacités de manipulation sont énormes et très dangereuses. Et il va les enseigner à Arsène.

On bascule alors dans un monde à part où la réalité devient un jeu vidéo, à moins que ce ne soit l'inverse. L'auteur prend un malin plaisir à nous perdre dans des circonvolutions numériques. Qui sommes-nous finalement ? Des humains ayant leur libre arbitre ou des êtres téléguidés composés de bits et de pixels ?

On va de surprise en surprise et je ne peux pas en dire plus pour ne pas dévoiler l'intrigue. Pour le lecteur qui a déjà lu Vita Nostra, du même auteur (du même binôme devrait-on dire), on est surpris au départ par l'apparente simplicité de l'histoire : un jeune ado qui joue à des jeux de rôles. Puis, on retrouve vite la patte des Diatchenko lorsque tout se met en place, dans cette histoire effrayante et attirante en même temps.

Le précédent roman était un monde de mots, de verbes, ici c'est un monde numérique qui nous attend. On peut également y voir un avertissement sur la société que nous sommes en train de bâtir, sur la trop grande importance que nous accordons au virtuel. Et bien sûr, le thème principal de ce roman, la manipulation des masses. Ce n'est plus la religion qui est l'opium du peuple, mais le numérique.

Un roman vraiment surprenant, à lire que l'on soit gameur ou pas du tout (ce qui est mon cas).

Marquise

Publié le 25 juin 2021

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