Archives de l’exode est une nouvelle fois une belle œuvre de l’autrice SF positive.

Archives de l'exode - Les critiques de Yuyine
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Comme tous les livres de Becky Chambers me provoquent des immenses coups de cœur et  me redonnent espoir, en ces temps troublés il me semblait nécessaire d’y avoir recours. Je me suis donc plongée dans Archives de l’exode, troisième volume de la saga Les Voyageurs dont les volumes se lisent de manière indépendante. Sorti en mars 2023 en format collector chez L’Atalante, Archives de l’exode nous emmène au coeur de la Flotte humaine. Et voici ce que j’en ai pensé…

Des vies ordinaires de gens ordinaires

Becky Chambers nous ouvre un nouveau pan de son univers avec ce troisième volume de la série Les Voyageurs. Elle nous invite cette fois au sein de la Fotte d’exodiens, ces humains dont les ancêtres ont fui leur planète pour une vie d’errance dans l’espace avant d’être accueillis dans l’UG. Un troisième opus essentiellement porté sur l’humanité et sa façon de vivre au sein de cette Flotte mais qui cache, comme toujours, beaucoup de richesse en son sein. Une forme de micro-société en errance, avec sa volonté farouche de ne pas reproduire les erreurs des sociétés terrestres, quitte à s’isoler d’une partie de l’UG, notamment par son refus d’utiliser des crédits. Mais aussi une micro-société tournée vers la solidarité, l’apport de toustes à la survie de la Flotte et la puissance des liens qui caractérisent l’humanité. L’autrice nous présente ici un panel de personnages d’âges et de rôles différents au sein de la Flotte. Des gens ordinaires, dans leur vie quotidienne, ponctuée parfois de moments plus notables, de quelques bouleversements, mais sans jamais devenir tout à fait sensationnels. La simplicité d’existences qui tentent tout simplement d’atteindre une sorte de stabilité et/ou de bonheur avec toutes les questions que cela soulève. De celleux qui voudraient que tout reste ainsi, dans l’idéal de leurs ancêtres à celleux qui rêvent d’ailleurs, d’aventure et d’exploration, ce roman interroge à hauteur d’humains la philosophie de cette Flotte d’exode et, au-delà, l’utopie fragile de cette humanité jadis en fuite d’un monde détruit. Elle est source d’un espoir qui fait toujours beaucoup de bien. Même si ce n’est pas acquis, même si ce n’est pas toujours simple et même si elle se construit sur des contraintes, la vie dans la Flotte est une belle utopie.

Une fermeture à l’ailleurs qui laisse une légère frustration

Bien qu’encore une fois je me sois totalement laissée séduire par la plume de l’autrice et sa capacité de rendre l’ordinaire fascinant. [...] Cela dit, revenir à l’humanité dans ce troisième opus n’empêche ni les belles valeurs chères à l’autrice, ni l’émotion. Parce que l’humanité a un rapport à l’autre, dans la vie comme dans la mort, qui est source de beauté tant la puissance de ces liens est forte. Ici, entre les rites funéraires de la Flotte et les évènements, ce rapport entre vie et mort et cette importance du lien sont magnifiquement retranscrites. Becky Chambers frappe à nouveau juste et rend l’ordinaire parfaitement intéressant. Et c’est dans cette vie de tous les jours qu’elle aborde simplement des questions puissantes telles que l’immigration, l’avancée des IA, la quête impossible du sens de la vie (qu’elle reprend brillamment dans Histoires de moine et de robot)… sans aucune prétention mais toujours une belle justesse. Et cela rend ce roman encore une fois formidable.

En bref, Archives de l’exode est une nouvelle fois une belle œuvre de l’autrice SF positive. En toute simplicité, elle propose une utopie qu’elle questionne, des sujets forts et des valeurs qui lui sont chères en restant à hauteur d’humains. Si l’histoire de ces êtres, héritiers d’une fuite autant que d’un espoir, m’a d’abord moins comblée que les précédents volumes du même univers, j’ai été malgré tout conquise par la justesse du propos et la beauté de ce qui y est énoncé.

Publié le 20 juillet 2023

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