La Flotte perdue représente en quelque sorte la quintessence du space opera militaire, avec un conflit interstellaire, une flotte de vaisseaux spatiaux et la mise en scène de tactiques de combat avancées au fil des situations rencontrées au fil de l’intrigue.
Et ces tactiques de combat, élément constituant du space opera militaire, représentent l’intérêt principal d'Indomptable. Déjà, l’auteur puise dans son expérience d’ancien marine pour nous plonger dans une ambiance militaire avec réalisme. La précision avec laquelle le capitaine Geary déploie stratégies et tactiques de combat reflète l’expérience militaire de l’auteur, un délice pour les lectrices et lecteurs qui apprécient les puzzles, la réflexion et le déploiement de solutions tactiques.
Ensuite, l’auteur a très bien su adapter cet univers militaire et ces tactiques de combat aux réalités de l’espace telles qu’on pourrait les imaginer, de l’immensité des distances dans un système stellaire au temps de latence dans la communication entre des navires situés à plusieurs secondes voire minutes-lumière les uns des autres. Les amateurs de hard science fiction trouveront leur compte dans le souci de précision et de cohérence de Jack Campbell.
Cette ambiance militaire et stratégique est très bien rendue, mais rend les relations entre les personnages très froides et professionnelles. Ce qui ne sera pas un souci pour les amateurs d’intrigues centrées sur la réflexion, mais risque de frustrer les lecteurs qui apprécient un développement émotionnel prononcé des personnages. Ici, même si les émotions du capitaine Geary, et leur évolution, sont subtilement présentées, nous avons essentiellement affaire à des personnages rationnels qui se laissent guider par la logique plus que par l’émotion.
Un point intéressant au sujet des personnages, c’est la présence de protagonistes féminins remplissant des rôles d’officiers, commandants ou représentantes politiques. Dans un space opera militaire aussi prononcé, c’est très agréable de voir que nous n’évoluons pas pour autant dans un univers exclusivement masculin.
L’homme, la légende et les valeurs d’une société
Un autre aspect intéressant d’Indomptable, c’est de suivre la manière dont le capitaine Geary réagit face à la situation : devenu le légendaire Black Jack Geary, il doit remplir les bottes de cet homme de légende, alors que lui-même ne prend aucun plaisir à être ainsi idéalisé. Doit-il montrer son humanité, ou au contraire jouer sur la légende pour maintenir la cohésion de sa flotte ?
Pour corser la situation, John Geary, après un siècle de sommeil, doit réapprendre les normes culturelles et sociales de l’Alliance, qui ont tant changé après toutes ces années de combat. Et certaines choses vont à l’encontre de ses propres valeurs, ne serait-ce que le relâchement du respect et de l’obéissance de la hiérarchie, parmi beaucoup d’autres choses. D’un côté, il doit comprendre et s’adapter au monde dans lequel vivent ses hommes. Mais de l’autre, il va être confronté à certains dilemmes moraux qu’il n’est pas facile de faire comprendre à ces nouvelles générations forgées par la guerre.
Entre la légende et les valeurs de cette nouvelle culture, ce sont des implications politiques et diplomatiques complexes que Jack Campbell met en scène de manière subtile au fil de l’intrigue, montrant la difficulté de tout leader.
En conclusion, Indomptable est le premier tome d’une série qui ravira les amateurs de space opera militaire, avec de la stratégie de combat dans l’espace, présentée de manière intelligente et crédible. Si vous aimez les récits orientés vers la réflexion, à la manière de la Fondation d’Asimov par exemple, alors vous devriez prendre le temps de découvrir La Flotte perdue.