Les personnages évoluent mais Simone Buchholz n’a rien perdu de son style narratif. Des mots qui souvent font sourire mais qui dissimulent habilement une vision juste de l’humain et d’une société qui elle n’a plus rien d’humain.

Béton rouge - Le tour du monde en 80 ... polars
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Chastity mélancolique et solitaire. Dés le début j’ai senti que c’était différent. Elle est envoyée pour s’occuper d’une affaire singulière. Devant le siège de Mohn & Wolff, le plus gros groupe de presse hambourgeois, une découverte lugubre l’attend, un homme enfermé dans une cage en métal noir cadenassé, il est inconscient, nu et son corps porte d’innombrables hématomes et écorchures. Une affaire spéciale pour le Service des Affaires spéciales du LKA (Landeskriminalamt). Pour une fois Chastity Riley du Bureau du procureur, ne fait pas équipe avec ses habituels collègues de la Kripo mais avec Ivo Stepanovic du LKA. Un binôme est né, Chastity est un peu dépassée par ce nouvel environnement avec un spécialiste dont le professionnalisme crève l’écran.

Simone Buchholz fait évoluer ses personnages, tout pouvait continuer comme avant mais l’auteure en a décidé autrement. Les habituels complices de Chastity déconnent tous et Faller son mentor est en vacances au soleil. Chastity est seule, seule avec ses bières, un peu de vodka, les cigarettes et une enquête avec Stepanovic qui n’est sans doute pas un marrant.

Une deuxième cage et une deuxième agression. Qui peut bien s’acharner sur les managers de Mohn & Wolff  ? Les deux victimes étaient des décideurs pour qui seules les performances de l’entreprise comptent même si cela implique le sacrifice d’êtres humains. Ils ont été formés dans le même moule, dés le plus jeune âge et dans le même internat pour ados où il y avait aussi le président du directoire de Mohn & Wolff. Il fait idéalement la prochaine victime. La solution de ces agressions violentes et dégradantes est sans doute à rechercher dans cet internat très spécial du sud de l’Allemagne. 

Chastity Riley et Stepanovic en tête-à-tête et profitant de la campagne bavaroise lors d’un mois de septembre anormalement chaud ( tout est déréglé autour de Chastity ), voilà bien une situation saugrenue ! Les personnages évoluent mais Simone Buchholz n’a rien perdu de son style narratif. Des mots qui souvent font sourire mais qui dissimulent habilement une vision juste de l’humain et d’une société qui elle n’a plus rien d’humain. Une rafale de courts chapitres aux titres énigmatiques, pas mal de bières, l’affaire est résolue et l’auteure nous a parlé de harcèlement chez les jeunes et de celui plus insidieux qui a valeur de management dans les entreprises. 

Ils sont assis dans leurs gros fauteuils de patrons et gagnent des paquets de fric, tandis que d’autres perdent leur boulot. Ils font partie de ceux qui bétonnent l’ordre social … Chaque fois qu’ils licencient un collaborateur pour des raisons de coût, ils créent un climat où les fascistes accumulent les victoires – parce que la peur rend les gens cons -, mais ils n’en ont rien à cirer.

Publié le 15 mars 2023

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