Et dire que j’ai failli ne pas le lire ! C’est qu’à bien y songer, suivre le parcours d’un petit mendiant enlevé pour être destiné au plus luxueux et au plus sordide des lupanars de Florence, ce n’est pas mon type de lectures favorites. J’avais tort. La destinée de Luca Bastardo, Luca le bâtard, est une de celles qui vous retiennent, même si le roman commence dans la prison où il attend d’être conduit au bûcher. Seul adoucissement, il y écrit sa vie sur le petit cahier que lui avait offert Pétrarque. Car Luca, s’il n’est pas lui-même un artiste et a plutôt touché à tout, de la piraterie à l’alchimie, est sensible à la beauté. Au cours de sa très longue vie – il va avoir deux cents ans, raison pour laquelle on le tient pour un sorcier – il aura fréquenté Giotto, Léonard de Vinci, Marsile Ficin, Cosme et Laurent de Médicis… Il aura même assisté aux excès et à la fin de Savonarole. C’est d’ailleurs la grâce des fresques de Giotto qui lui aura permis de s’évader en esprit de cette enfance martyre auprès de Bernardo Silvano dont la cupidité n’a égale que la cruauté, et ce qui lui gardera cette pureté intérieure malgré ce qu’il devra vivre. Mais Luca n’a jamais été un sorcier, même s’il est resté toute sa vie sous le poids d’une lettre qui en attesterait et mentionnerait ses parents. Sûr moyen de chantage pour le répugnant Silvano. Il est simplement l’héritier malheureux d’une grande beauté et d’une très longue vie. Il paraît encore treize ans à trente. Pas le genre de ce qui vous porte à l’amour de Dieu, surtout quand on a survécu à certains de ses prêtres et que l’on a vu ses amis mourir de la peste. En tant de temps, on a celui de trouver le grand amour mais aussi de s’intéresser à l’alchimie auprès de Gerber, à la Kabbale, aux Cathares et à bien d’autres traditions ésotériques. Cependant, même si l’on y trouve un vagabond et son âne qui, eux non plus, semblent ne pas vieillir, l’auteur ne fait qu’effleurer. Pas de mystérieux complots aux sombres arcanes. Il s’agit davantage d’éléments de décor pour ce qui est un magnifique panorama de la Toscane des Médicis. Dans un style agréablement érudit, Traci L. Slatton, retrace ici la vie bouillonnante et tumultueuse de la Renaissance, qui vit l’apogée du crime et de l’art. Elle écrit surtout une véritable lettre d’amour à Florence et à cette époque. Pour le très vif plaisir du lecteur !   Hélène, 12 décembre 2009, parcheverses.blogspot.com.

Slatton - Immortel - CitronMeringue

   Et dire que j’ai failli ne pas le lire ! C’est qu’à bien y songer, suivre le parcours d’un petit mendiant enlevé pour être destiné au plus luxueux et au plus sordide des lupanars de Florence, ce n’est pas mon type de lectures favorites. J’avais tort. La destinée de Luca Bastardo, Luca le bâtard, est une de celles qui vous retiennent, même si le roman commence dans la prison où il attend d’être conduit au bûcher. Seul adoucissement, il y écrit sa vie sur le petit cahier que lui avait offert Pétrarque. Car Luca, s’il n’est pas lui-même un artiste et a plutôt touché à tout, de la piraterie à l’alchimie, est sensible à la beauté. Au cours de sa très longue vie – il va avoir deux cents ans, raison pour laquelle on le tient pour un sorcier – il aura fréquenté Giotto, Léonard de Vinci, Marsile Ficin, Cosme et Laurent de Médicis… Il aura même assisté aux excès et à la fin de Savonarole. C’est d’ailleurs la grâce des fresques de Giotto qui lui aura permis de s’évader en esprit de cette enfance martyre auprès de Bernardo Silvano dont la cupidité n’a égale que la cruauté, et ce qui lui gardera cette pureté intérieure malgré ce qu’il devra vivre. Mais Luca n’a jamais été un sorcier, même s’il est resté toute sa vie sous le poids d’une lettre qui en attesterait et mentionnerait ses parents. Sûr moyen de chantage pour le répugnant Silvano. Il est simplement l’héritier malheureux d’une grande beauté et d’une très longue vie. Il paraît encore treize ans à trente. Pas le genre de ce qui vous porte à l’amour de Dieu, surtout quand on a survécu à certains de ses prêtres et que l’on a vu ses amis mourir de la peste. En tant de temps, on a celui de trouver le grand amour mais aussi de s’intéresser à l’alchimie auprès de Gerber, à la Kabbale, aux Cathares et à bien d’autres traditions ésotériques. Cependant, même si l’on y trouve un vagabond et son âne qui, eux non plus, semblent ne pas vieillir, l’auteur ne fait qu’effleurer. Pas de mystérieux complots aux sombres arcanes. Il s’agit davantage d’éléments de décor pour ce qui est un magnifique panorama de la Toscane des Médicis. Dans un style agréablement érudit, Traci L. Slatton, retrace ici la vie bouillonnante et tumultueuse de la Renaissance, qui vit l’apogée du crime et de l’art. Elle écrit surtout une véritable lettre d’amour à Florence et à cette époque. Pour le très vif plaisir du lecteur !

 

Hélène, 12 décembre 2009, parcheverses.blogspot.com.

Publié le 5 février 2010

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