D’origine américaine, Traci L. Slatton, avec ce premier roman, signe une entrée remarquée et réussie dans la cour des auteurs aimant mêler histoire et fantastique. Le cadre des aventures de Luca l’orphelin dit Luca Bastardo, est celui de l’Italie de la Renaissance. Dans ce théâtre des grandes mutations qui annoncent l’entrée de l’Europe dans les Temps modernes et dans celles des violences religieuses après la Réforme, Luca possède le don exceptionnel de vivre très longtemps. « Il est vrai que tous les hommes meurent, que les villes déclinent, que les principautés s'éteignent et que des civilisations brillantes sont soufflées, réduites à des filaments de fumée grise.
Mais, par la bénédiction et la malédiction d'un Dieu rieur, je suis différent ». Ce pouvoir troublant qui pourrait annoncer, pour les esprits humanistes, la capacité de l’homme à dépasser les limites physiques connues est aussi perçu dangereusement par ceux obsédés par les signes de Dieu et les marques du Diable. La première partie émouvante raconte la vie sordide du héros durant son enfance. Sorti des rapines de la rue, il est enfermé dans un lupanar dirigé par le redoutable Bernado Silvano. Son amour de l’art et notamment des fresques de Giotto permet à Luca de ne pas sombrer dans la folie. Victime de la honte et de l’infamie, le jeune héros parviendra à s’enfuir, après moult souffrances, en profitant de la peste qui ravage la ville des Médicis. À la recherche de ses origines et de l’amour qui le réconciliera enfin avec lui-même, Luca l’immortel n’aura de cesse, dans la deuxième partie, de fuir un implacable ennemi tissant sa toile au-delà de l’Eglise et du temps. Comme le dit un personnage, « l’adversité ne meurt jamais » pour un Florentin. Au cours de ses pérégrinations, le héros, au destin hors du commun, côtoiera les plus grands esprits que la région de Florence a comptés depuis le XIVe siècle avec Pétrarque, dans les lettres, les arts et les sciences, jusqu’au maestro, Léonard de Vinci. L’intérêt de l’ouvrage est de décrire les mille visages de Florence et des campagnes environnantes, depuis les bas-fonds de la cité jusqu’aux églises et palais richement décorés par les plus grands artistes de la Renaissance. Ville humaniste par excellence, elle possède également pour l’écrivain un côté sombre, voire cruel, rappelant par moment le message manichéen de la religion de l’ancienne Perse ou celle des Cathares. Accompagné de savoureux débats philosophiques et de nombreuses rencontres artistiques, le récit convoque l’histoire avec talent pour donner une profondeur réaliste au récit, démontrant un travail sérieux sur les sources. On peut regretter cependant le dénouement du roman, exagérément fantastique avec les explications alambiquées sur le don de Luca Bastardo. Les amateurs des mystères ésotériques, sensibles à la quête alchimique, seront ravis sans doute. Les autres, un peu moins. Mais ne boudons pas les nombreuses qualités d’un livre qui réussit si bien à nous transporter en Toscane, au temps de la Renaissance italienne. Mourad Haddak - Boojum mag

Slatton - Immortel - Boojum Mag

D’origine américaine, Traci L. Slatton, avec ce premier roman, signe une entrée remarquée et réussie dans la cour des auteurs aimant mêler histoire et fantastique.

Le cadre des aventures de Luca l’orphelin dit Luca Bastardo, est celui de l’Italie de la Renaissance. Dans ce théâtre des grandes mutations qui annoncent l’entrée de l’Europe dans les Temps modernes et dans celles des violences religieuses après la Réforme, Luca possède le don exceptionnel de vivre très longtemps.

« Il est vrai que tous les hommes meurent, que les villes déclinent, que les principautés s'éteignent et que des civilisations brillantes sont soufflées, réduites à des filaments de fumée grise.
Mais, par la bénédiction et la malédiction d'un Dieu rieur, je suis différent ».

Ce pouvoir troublant qui pourrait annoncer, pour les esprits humanistes, la capacité de l’homme à dépasser les limites physiques connues est aussi perçu dangereusement par ceux obsédés par les signes de Dieu et les marques du Diable.

La première partie émouvante raconte la vie sordide du héros durant son enfance. Sorti des rapines de la rue, il est enfermé dans un lupanar dirigé par le redoutable Bernado Silvano. Son amour de l’art et notamment des fresques de Giotto permet à Luca de ne pas sombrer dans la folie. Victime de la honte et de l’infamie, le jeune héros parviendra à s’enfuir, après moult souffrances, en profitant de la peste qui ravage la ville des Médicis.

À la recherche de ses origines et de l’amour qui le réconciliera enfin avec lui-même, Luca l’immortel n’aura de cesse, dans la deuxième partie, de fuir un implacable ennemi tissant sa toile au-delà de l’Eglise et du temps. Comme le dit un personnage, « l’adversité ne meurt jamais » pour un Florentin. Au cours de ses pérégrinations, le héros, au destin hors du commun, côtoiera les plus grands esprits que la région de Florence a comptés depuis le XIVe siècle avec Pétrarque, dans les lettres, les arts et les sciences, jusqu’au maestro, Léonard de Vinci.

L’intérêt de l’ouvrage est de décrire les mille visages de Florence et des campagnes environnantes, depuis les bas-fonds de la cité jusqu’aux églises et palais richement décorés par les plus grands artistes de la Renaissance. Ville humaniste par excellence, elle possède également pour l’écrivain un côté sombre, voire cruel, rappelant par moment le message manichéen de la religion de l’ancienne Perse ou celle des Cathares.

Accompagné de savoureux débats philosophiques et de nombreuses rencontres artistiques, le récit convoque l’histoire avec talent pour donner une profondeur réaliste au récit, démontrant un travail sérieux sur les sources.

On peut regretter cependant le dénouement du roman, exagérément fantastique avec les explications alambiquées sur le don de Luca Bastardo. Les amateurs des mystères ésotériques, sensibles à la quête alchimique, seront ravis sans doute. Les autres, un peu moins. Mais ne boudons pas les nombreuses qualités d’un livre qui réussit si bien à nous transporter en Toscane, au temps de la Renaissance italienne.

Mourad Haddak - Boojum mag

Publié le 3 mai 2010

à propos de la même œuvre