Avec seulement quelques dragons de labour, L’Ensorceleur des choses menues sait éviter avec adresse tous les clichés du genre. Et j’avoue que pour une fois, me pencher sur les problèmes de la classe moyenne et de ceux qui font le plus souvent office de figurants dans les romans de fantasy habituels, m’a énormément plu.

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Récemment un article fit couler beaucoup d’encre en se demandant pourquoi la fantasy française se vend mal par rapport à l’anglo-saxonne. Que l’on soit d’accord ou non avec les conclusions du journaliste, le manque de qualité ou d’originalité n’est certainement pas en cause. L’Ensorceleur des choses menues de Régis Goddyn en est la preuve parfaite. Repéré sur un stand de Livre Paris, il ne m’a pas déçue, moi qui déteste la fantasy qui rejoue un énième copié/collé de Tolkien ou réinvente encore un voyage avec un jeune paysan destiné à sauver le monde.


Avec seulement quelques dragons de labour, L’Ensorceleur des choses menues sait éviter avec adresse tous les clichés du genre. Certes, il raconte un voyage initiatique, mais celui qui l’entreprend n’est pas un jeune adolescent. C’est un vieil homme déclassé qui a passé sa vie d’adulte à utiliser la magie pour rendre de menus services (résoudre des problèmes de plomberie, consolider une porte ou porter ses commissions sans se fatiguer). À la retraite, il prend sous son aile Prune, une jeune fille rebelle qui l’entraîne bien malgré lui aux confins de ce monde et du suivant. Le vieil enchanteur finira par renverser l’ordre établi, basé sur un commerce millénaire particulièrement immonde.


Sous un titre léger et plaisant, Régis Goddyn signe avec L’Ensorceleur des choses menues un roman profond où se mêlent plusieurs thématiques : le bilan d’une vie, la place de chacun dans la société, et notamment celle des femmes dans un univers de fantasy classique (même si, à la lecture de quelques détails, on reste bien conscient que c’est un homme qui écrit), la transmission d’une génération à l’autre. Le ton lui-même est crépusculaire, mais le roman n’est pas triste pour autant. Il se termine en demi-teinte sur une note finalement assez heureuse. Et j’avoue que pour une fois, me pencher sur les problèmes de la classe moyenne et de ceux qui font le plus souvent office de figurants dans les romans de fantasy habituels, m’a énormément plu.

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Publié le 12 juin 2019

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