Chroniques de l'imaginaire

Lors d'une de ses gardes aux frontières de VDNKh, la station où il vit, Artyom rencontre Hunter, l'un de ces stalker légendaires, qui est un ami de son père adoptif. Avant de partir pour une mission dangereuse, Hunter lui confie un objet à porter à Polis, le coeur du métro, au cas où il ne reviendrait pas. Et voilà le tout jeune homme lancé dans des pérégrinations hasardeuses, qui lui feront faire le tour de ce qui reste de l'ancien métropolitain moscovite, et qui est devenu un ensemble chaotique de minuscules nations composées de quelques stations, où les règles, les croyances et les dangers changent de l'une à l'autre.

Roman initiatique, roman de quête, certes, mais dans une ambiance post-apocalyptique sombre et crédible, ce pavé de plus de six cents pages repose sur un postulat tout à fait vraisemblable : un beau jour, quelqu'un, quelque part, commence l'apocalypse nucléaire, et les seuls survivants humains sont les gens qui se trouvaient à l'abri sous terre. Partant de là, en peu de temps, toute une civilisation se construit, qui n'a plus grand-chose de commun avec la "vie d'avant". L'auteur a pris le parti de situer son histoire quinze ou vingt ans après les évènements, ce qui lui permet de rappeler à ses lecteurs, par la bouche de ses personnages qui ont commencé leur vie à la surface, combien notre planète est belle et fragile, et combien la vie peut y être plaisante.

Bien sûr, l'action se situant à Moscou, et étant narrée du point de vue d'un jeune homme quelconque, on ne sait et on ne saura rien de ce qui a pu se passer dans le reste du monde, ce postulat rendant encore plus étouffant le huis-clos, pour les personnages et pour le lecteur. L'absurdité de cette vie souterraine si parcellisée en territoires ennemis est bien rendue par ces personnages qui apparaissent, puis sont arrachés à la connaissance du héros, et du lecteur (Khan, la Brigade rouge internationale...), et sa cruauté, sa précarité, par un nombre impressionnant de morts dans son entourage.

On peut trouver la fin un peu rapide, j'aurais pour ma part souhaité davantage de détails sur les Noirs, mais du fait que l'histoire est racontée du point de vue d'Artyom, le lecteur ne peut que partager ses propres convictions et informations. Telle quelle, la fin amplifie l'impression de désespoir absolu qui imprègne ce roman puissant remarquablement écrit.

A ce propos, on ne peut que saluer le magnifique travail du traducteur, qui semble "transparent", ce qui est à mon sens la plus grande qualité d'une traduction. Du fait de la complexité du métro moscovite, on apprécie grandement la présence des plans des lignes, même s'ils ne sont pas suffisants pour se repérer à coup sûr. Quoi qu'il en soit, c'est une excellente idée de les avoir mis, et vaut un coup de chapeau supplémentaire à l'éditeur pour la qualité de son travail.

Mureliane, le 02 Juillet 2010

Publié le 7 juillet 2010

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