Dmitry Glukhosky - Sumerki - Galaxies
 

Sumerki, titre que l’éditeur n’a sans doute pas désiré traduire, car il rappelle trop d’autres séries en vue, veut dire « Le Crépuscule ». Que le lecteur ne s’y trompe pas : il s’agit ici de toute autre chose. On n’est pas dans l’univers de Metro, ce n’est pas une série, le style est très différent. Et ce n’est pas plus mal !

 L’histoire se passe à Moscou. Le héros est traducteur et, lassé par toutes les traductions techniques qu’il doit réaliser, il « s’invente » traducteur d’espagnol pour que son agence lui confie quelque chose d’autre. Il va ainsi recevoir le deuxième chapitre d’un manuscrit dont le traducteur précédent a mystérieusement disparu. Le texte raconte une expédition au Yucatan au XVIe siècle. Dmitry, le traducteur, est troublé par ce qu’il découvre, mais malgré sa curiosité, les chapitres ne lui parviennent qu’au fur et à mesure. Petit à petit, le monde – ou la perception qu’il a de ce qui l’entoure – va changer, se bouleverser parallèlement à ses traductions.  Le lecteur est très vite accroché par le récit. L’alternance de la traduction du texte en espagnol et de la vie du traducteur crée un climat flou. On ne voit pas où l’auteur veut nous amener : policier, fantastique ?  Il est à regretter qu’une fois le lecteur « ferré », l’histoire traîne avec peu de choses neuves à se mettre sous la dent. C’est le plus gros défaut du livre : sa longueur. Mais l’auteur arrive quand même à maintenir un suspense. Les pages se tournent rapidement et au moment où, il faut bien l’avouer, on commence à s’ennuyer, il fait basculer l’histoire et nous offre un très beau final.

 La question est de savoir où se situe la réalité. Le monde semble trembler sous diverses catastrophes. Tout cela est-il bien réel, ou notre traducteur ne devient-il pas un peu paranoïaque ? Le monde qu’on nous décrit est-il le vrai, celui qui est dans la tête de Dmitry le traducteur ou dans celle d’une autre personne ?

 

Le récit est écrit à la première personne et le fait que le héros ait le même prénom et nom patronymique que l’auteur – Dmitry Alekseïevitch – n’est pas innocent. Une façon pour lui de nous mettre sur la voie et de nous rappeler discrètement que, peu importe quelle réalité le lecteur choisit, celui qui a le dernier mot et qui a créé le monde, c’est Dmitry Alekseïevitch Glukhovsky. Notons encore que, plus libre que dans la série des Metro, l’auteur se permet à plusieurs reprises d’y mettre des choses plus personnelles. Certaines digressions sur la religion ou l’économie viennent bien à propos à des moments où le rythme est moins soutenu. Sumerki est finalement une belle découverte pour celui qui veut un peu sortir des sentiers battus.

 

David Claes, Galaxies n 31

 

Publié le 27 janvier 2015

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