Sa dénonciation des élites avides de pouvoir est tout aussi claire, tandis qu’il exprime sa conviction que l’art, la sensibilité, l’attention et, bien sûr, l’amour sont des forces puissantes et constitutives de l’état d’humanité.

Trilogie des Guerriers du silence - Lagrandeparade
Article Original

La confédération de Naflin est composée de quelques cent mondes, parmi lesquels la somptueuse Syracusa. La famille régnante s’adjoint l’aide des Scaythes d’Hyponéros, des êtres mystérieux dotés de facultés psychiques impressionnantes, afin de renforcer leur pouvoir. Ce qu’ils ignorent, c’est que les Scaythes poursuivent leur propre but, dont l’instauration d’une dictature au cœur de la confédération n’est qu’une étape. Face à eux, peu osent se lever. Sauf un obscur employé d’une société de voyage dématérialisé, séduit par une belle Syracusaine. Et quelques autres, les guerriers du silence, dont on ne sait s’ils sont réels ou une simple légende.

L’ensemble se déroule sur trois (gros) tomes, pour plus de 1600 pages : Les guerriers du silence, Terra Mater et La citadelle Hyponéros.

On a donc d’un côté les méchants, les Scaythes, au service de l’Ennemi, le Blouf, l’Incrée, qu’on a du mal à appréhender ; mais aussi l’Église, plus proche des horreurs de l’inquisition que de la théologie de la libération. Les croix de feu (à combustion lente, s’il vous plaît) sont une forme de torture particulièrement horrible (et publique !), largement utilisées par les cohortes de missionnaires venus imposer la seule vraie foi sur toutes les planètes de la confédération. De l’autre côté, les gentils, les résistants, éparpillés sur différents mondes, peu nombreux, pas formés, mais qui maîtri-sent/seront l’antra, un son capable de faire barrage au néant du Blouf.

[…]

Vous l’aurez compris, l’imagination est au rendez-vous, avec cette écriture bourrée de détails qui est la marque de Bordage. Oui, mais… parce que vous l’aviez deviné, il y a un gros mais… Les personnages sont à notre sens tellement nombreux, variés, qu’ils n’acquièrent pas vraiment d’individualité, encore moins de profondeur… Des ellipses dans le temps, des disparitions inopinées laissent le lecteur sur la touche. Et surtout, les motivations des personnages en question, en particulier celle de Tixu, l’employé de l’agence de voyages, sont un peu légères (à moins de croire dur comme fer au coup de foudre qui balaye tout). Le procédé est à chaque fois le même pour les couples de héros/héroïnes qui tombent amoureux au premier regard et ne semblent mus que par cet élément. Le schéma de leur rencontre est toujours le même et devient répétitif lorsqu’il y a six couples…

Si Bordage fait la part belle à la spiritualité, on comprend bien que ce n’est pas dans le cadre d’une église constituée, dont il dénonce puissamment les travers et les abominations. Sa dénonciation des élites avides de pouvoir est tout aussi claire, tandis qu’il exprime sa conviction que l’art, la sensibilité, l’attention et, bien sûr, l’amour sont des forces puissantes et constitutives de l’état d’humanité. C’est parfois un peu manichéen, mais on aurait du mal à ne pas accrocher à cette idée.

Lagrandeparade

Publié le 20 août 2020

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