Je lirai sans aucun doute les deux tomes suivants. De plus, c’est à signaler, je trouve que ce roman constitue une très bonne porte d’entrée pour quelqu’un qui voudrait se lancer en douceur dans la SF militaire (spatiale), puisque c’est plus digeste que les nombreux et très gros tomes d’Honor Harrington (à moins d’être complètement allergique aux omniprésents acronymes militaires).

Coeurs d'acier - Le culte d'Apophis
Article Original

H. Paul Honsinger est un écrivain américain natif de Louisiane et vivant désormais en Arizona. Cœurs d’acier est le premier roman d’une trilogie de SF militaire (De haut bord), présentée par L’Atalante comme étant dans la lignée des cycles d’Honor Harrington ou de la Flotte perdue. Une seconde trilogie est d’ores et déjà en chantier, et d’autres romans sont prévus dans un futur indéterminé.
Ce livre raconte l’histoire de Max Robichaux, un Cajun de 28 ans, qui se voit confier le commandement de l’USS Cumberland, un destroyer chargé d’aller jouer au corsaire dans une zone spatiale franche où s’approvisionnent les Krags (des extraterrestres dont le Dieu a décrété que la race humaine devait être détruite) et de perturber leur ravitaillement et leurs échanges commerciaux. Une tâche qui va s’avérer d’autant plus périlleuse que l’équipage de son nouveau bâtiment a une lourde réputation d’inefficacité, et que certains de ses officiers vont se mutiner contre sa reprise en main de la situation et une mission perçue comme quasi-suicidaire…
Vous remarquerez l’illustration de couverture de très grande qualité, signée Gene Mollica. Le personnage très réaliste, l’effet de perspective et le remarquable travail sur les couleurs sont admirables. La troisième de couverture nous montre les illustrations des tomes 2 et 3, qui sont… encore plus belles !

Univers, genre(s), inspirations, ressemblances (ou pas)
Il y a effectivement certaines ressemblances avec le cycle d’Honor Harrington (HH), mais avec un contexte politique beaucoup moins développé et de nombreuses races extraterrestres en plus. D’ailleurs, l’ennemi n’est pas une autre nation humaine (outre l’Union terrienne, il y a d’autres entités politiques constituées par des humains, mais elles sont neutres dans le conflit et ne représentent que 95 planètes sur les 611 colonisées), mais une espèce alien qui ressemble furieusement à des Skavens de l’espace, les Krags. Ils veulent exterminer les humains parce que telle est la volonté de leur Dieu. Au moment où le récit démarre, le conflit dure depuis 34 ans. Signalons que certaines des nations neutres sont assez folkloriques, comme les Romanoviens par exemple.

Il faut signaler qu’il existe de nombreuses autres races extraterrestres dans l’univers du roman (trois douzaines, pour être précis), dont deux sont entraperçues et une est un peu plus décrite à la fin du livre. Elles sont parfois nettement plus avancées que les humains ou les Krags. L’échelle spatiale est vaste, puisqu’on s’étripe sur des milliers d’années-lumière de distance (l’espace connu s’étend sur tout le bras Orion-Cygne, pour les connaisseurs). […] Ce qui est amusant, c’est que les réactions de ces races à l’émergence des humains en tant que puissance majeure sont remarquablement similaires à celles que l’on peut voir dans le cycle phare de David Brin : ils sont quasi-unanimement considérés comme des parvenus.

Par rapport à HH, sur un pur plan technologique, il y a des ressemblances, comme deux modes de Propulsion plus Rapide que la Lumière (PRL), dont un qui met en jeu des points de saut (et un autre qui sort tout droit de Star Trek), une prépondérance des missiles sur les armes à énergie, des armes individuelles quasi-identiques, des vaisseaux stratifiés par tonnage, avec des désignations identiques à celles utilisées lors de la Seconde Guerre Mondiale (croiseur de combat, cuirassé, porteur d’escorte, destroyer, etc), des compensateurs d’inertie, des générateurs à fusion, etc, bref de nombreux points communs. Il y a cependant des différences, et pas des moindres : une emphase sur les armes blanches qui rappelle plus Starship Troopers que HH, des vaisseaux qui, à désignation identique (croiseur, frégate, etc), ont un tonnage moyen divisé par… cent par rapport à HH (un cuirassé pèse ici 65 000 tonnes au maximum, pas dans les 7 millions comme un supercuirassé Manticorien), et des tubes lance-missiles qui rappellent plus ceux d’un sous-marin que ceux d’un quelconque vaisseau de combat de la FRM (en clair : il y en a beaucoup moins).

A la base, c’est de la SF militaire, même s’il y a une légère touche post-apocalyptique. En effet, l’auteur a voulu revenir aux sources même d’Honor Harrington, à savoir les sagas navales et napoléoniennes mettant en scène Horatio Hornblower, Jack Aubrey (la très grosse influence de l’auteur de ce dernier est très clairement reconnue dans les remerciements), etc. Ce qui signifie une absence de femmes à bord des vaisseaux de guerre et la présence d’enfants et d’adolescents en tant que cadets. Il lui a donc bien fallu trouver une explication logique au fait que dans ce futur, il n’y a pas une seule femme dans les équipages et que par contre, en plus des hommes adultes, il y a des garçons. Autant le dire tout de suite, son explication tient la route, et c’est donc habilement qu’il peut concilier modernité et structure des équipages calquée sur la fin du dix-huitième ou le début du dix-neuvième siècle ! […]

Au final, nous avons donc quelque chose qui, par certains côtés, est identique ou quasiment au cycle phare de David Weber, par d’autres est plus simple (moins d’emphase sur la politique, contexte brossé à bien plus grands traits), par d’autres, encore, est différent, et qui par d’autres côtés, enfin, va plus loin dans la ressemblance avec la littérature militaire navale qui a inspiré aussi bien le papa de Honor Harrington que H Paul Honsinger. J’avais beaucoup aimé le film sur Jack Aubrey (Master and Commander) avec Russell Crowe dans le rôle-titre, et j’y retrouve la même ambiance du commandant expérimenté qui prend sous son aile des cadets terrifiés mais résolus à accomplir dignement leur devoir. La seule vraie différence est dans l’absence du fameux « Monsieur » avec lequel les supérieurs désignent leurs subalternes, y compris les cadets de huit ans.

Une dernière grosse différence est à signaler avec Honor Harrington : la taille du roman, 440 pages, ce qui est beaucoup, mais alors beaucaoup plus court que le roman moyen de l’Honorverse (cycle principal ou les deux dérivés), qui se balade le plus souvent entre 800 et 1100 pages.

Ce qu’il faut retenir, c’est que ce roman s’inspire autant de Tom Clancy que de David Weber, de Patrick O’Brian (Aubrey) ou de C.S. Forrester (Hornblower), avec quelques touches discrètes qui évoquent Scalzi ou Tanya Huff (au niveau des nombreuses races extraterrestres), et une ambiance globale qui navigue entre début du 19ème et guerre froide sous-marine. […]

En conclusion
Ce roman fait une habile fusion entre le style et les caractéristiques de la littérature militaire navale (Jack Aubrey, Horatio Hornblower) qui inspira David Weber et les livres consacrés à la guerre sous-marine de Tom Clancy. Il se sert d’une petite touche de post-apocalyptique pour justifier le fait que les femmes soient absentes des vaisseaux de guerre en cette année 2315 mais que, par contre, des garçons de huit ans (pour les plus jeunes) y servent en tant que cadets. […] Je lirai sans aucun doute les deux tomes suivants. De plus, c’est à signaler, je trouve que ce roman constitue une très bonne porte d’entrée pour quelqu’un qui voudrait se lancer en douceur dans la SF militaire (spatiale), puisque c’est plus digeste que les nombreux et très gros tomes d’Honor Harrington (à moins d’être complètement allergique aux omniprésents acronymes militaires).
 
Le culte d'Apophis
Publié le 8 février 2017

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