Avec ce Haut Bord, Honsinger ne coule pas. Il propose un roman de pure sf militaire, très inspiré des sous-marins de WWII, dans un univers qui ne demande qu’à s’enrichir.

Honsinger - Coeurs d'acier - Albédo
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Voici un nouveau venu dans la sf militaire, Paul Honsinger avec une trilogie baptisée Cœur d’Acier, De Haut Bord en est le tome d’introduction. Le lecteur découvre un jeune officier Max Robichaux tout fraîchement nommé à la tête d’un vaisseau spatial furtif, un destroyer du nom de Cumberland. L’équipage dispose d’une piètre réputation, mais l’Amiral en charge du secteur lui adjoint quelques solides ou brillants officiers pour le seconder. Sa mission infiltrer un secteur neutre et saper les voies logistiques ennemies.

Un navire de haut bord présente la particularité de ne pas pouvoir couler, en théorie. Nous pouvons d’ores et déjà apprécier l’inspiration maritime de l’auteur. Nous fera-t-il une Titanic ou pas ? A-t-il les moyens de détrôner David Weber et son cycle référence, Honor Harrington? Rivalise-t-il avec La Flotte Perdue de Campbell ?

 

De haut bord se dissocie de ces deux cycles, dont les « empires galactiques » sont en guerre entre humains. Dans Cœur d’acier, les humains affrontent des aliens, les redoutables Krags. D’autres organisations, nations spatiales, ou planètes sont originaires de notre bonne vielle Terre, mais peu d’entre elles se sont alliées à l’un des belligérants. Les communautés humaines présentées ne révolutionnent pas nos connaissances des diverses cultures actuelles : nous rencontrons un peuple marchand avec quelques influences multiculturelles, croisons un équipage prétendument mormon, des spatiaux digne de sa Majesté E.R. II…

A la différence de Weber, Honsinger met en scène plusieurs puissances extraterrestres spatiales. Les deux races mises en avant sont d’une part les Krags dont le rat bien de chez-nous est l’ancêtre, et les plefungs ressemblant au poisson-chat, en bien plus gros … et plus intelligent!

Il y a un peu plus de 30 ans, les Krags ont agressé brutalement et inopinément la Terre et ses planètes. Les raisons seront dévoilées plus tard dans le livre,  aussi je m’abstiendrai de vous faire des révélations. La survie de  milliards d’humains sont en jeu, car les faces de rat sont organisées, violentes et résistantes. C’est un peuple barbare et malin, l’association de ces deux caractéristiques en fait un adversaire coriace voire léthal.

Sur une autre partie du spectre extra-terrestre, se trouve les plefungs qui ressemblent fort au Peuple de l’eau de Poul Anderson dans Enseigne Flandry, la conquête spatiale en plus. C’est une espèce ayant un goût prononcé pour l’intégrité de son territoir spatial, la paix, ainsi que pour l’esthétisme; et j’ajouterai pour la contemplation. Elle demeure une nation farouchement neutre, comme la Suisse, mais sera amenée à jouer un rôle dans l’aventure de Max et compagnie.

En comparaison des deux sagas de Sf militaire, ce premier tome peine à sortir du lot en terme d’univers. Il n’offre pas un « empire » aussi fouillé que Manticore.  Même s’il est régulièrement reproché à David Weber ses descriptions politiques et socio-économiques tranchées, l’univers d’Honsinger ne possède pas cette complexité. Campbell dans La Flotte perdue  développe davantage l’aspect politique et les jeux diplomatiques au sein d’une même coalition et introduit un mode de vie qui ne reflète plus les us et coutumes des Armées et Marines passées  et actuelles.

L’originalité la plus flagrante tient en l’absence des femmes dans le récit. Bien que je ne sois pas affiliée à un mouvement féministe revendicatif, ce parti-pris me chagrine fortement. Les droits des femmes et le regard équitable dont elles doivent bénéficier sont un combat permanent. De nos jours, un auteur ne devrait pas les poser en simples poules pondeuses ! Oui, c’est un coup de gueule! D’ailleurs la raison, plutôt fallacieuse  invoquée dans son roman n’apporte absolument aucune plus-value au récit ou à la dramatique.

La trame est classique, surtout pour des romans d’aventures ou de guerre maritime. Le Culte d’Apophis dans sa critique évoque les romans de Tom Clancy à juste titre; et si le lecteur est familiarisé avec A la poursuite d’Octobre rouge, il y trouvera de nombreux parallèles. Paul Honsinger puise également son inspiration dans les nombreux récits de combats navals sous-mariniers de la seconde guerre mondiale, que ce soit dans l’approche des affrontements ou dans l’ambiance d’un bâtiment spatial.

Question protagoniste, je suis assez réservée. Le lecteur découvre un personnage attachant : Max Robichaux est un parfait meneur d’hommes, brillant tacticien et plutôt sympathique. Son bras droit dans l’aventure, n’est pas le second du vaisseau… mais Sahin, le médecin-chef, brillantissime au possible. Il est polyglotte (parle le latin couramment), versé dans toutes les religions, bretteur émérite, tireurs hors-pair avec une arme de poing, diplomate doué et pragmatique (et futur ambassadeur), négociateur viril et acharné, docteur dans l’âme… mais nul en traditions militaires. C’est un peu « too-much » pour moi. A noter la performance de l’Amiral copie magistrale du Général Patton (que j’admire énormément)! C’est un bel hommage.

Avec ce Haut Bord, Honsinger ne coule pas. Il propose un roman de pure sf militaire, très inspiré des sous-marins de WWII, dans un univers qui ne demande qu’à s’enrichir. En revanche, il n’est pas encore à la hauteur de la référence du genre HH, ni à celle de La Flotte Perdue.

Albédo

 

Publié le 15 novembre 2016

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