L'intrigue est quant à elle rondement menée, pleine de tension, de mystères et de coups de théâtre qui font qu'il est difficile de lâcher le livre avant la dernière page. C'est une belle réussite qui plaira aux aficionados de bons romans policiers et de bonnes uchronies.

Les enfants de la Terreur - Les Chroniques du Chroniqueur
Article Original

Nous sommes en novembre 1798, ou plutôt en Frimaire de l'an VII, dans une France où la Révolution va bon train. Installée à Londres depuis un bon moment, Geneviève s'est résignée à rentrer à Paris, sa situation financière ne lui laissant guère d'autre choix. Alors même qu'elle a servi son pays dans les cours étrangères pendant des années, le gouvernement révolutionnaire se refuse à lui verser la moindre pension et ignore les missives où elle propose de reprendre du service.

De son côté, Louis ne s'en tire pas beaucoup mieux. Il réussit encore à faire vivre les siens de sa plume, mais le voilà contraint de s'abaisser à rédiger le courrier du cœur d'une infâme feuille de chou pour avoir de quoi subsister dans une ville où le prix de la nourriture ne cesse d'augmenter. Rien ne prédisposait ces deux individus à se croiser, mais ils vont se retrouver impliqués bien malgré eux dans une enquête sur la disparition d'enfants des rues de Paris qui semble dissimuler un effroyable complot dont les rouages pourraient bien finir par les broyer…

Les enfants de la Terreur est un polar uchronique prenant place à Paris. Dans cet univers, le coup de force du 9 Thermidor s'est soldé par un échec,

Robespierre n'a jamais été renversé et il gouverne toujours la France d'une main de fer avec ses séides, les Saint-Just et autres Fouquier-Tinville qui envoient à la guillotine quiconque est soupçonné de la plus petite velléité de trahison. La Terreur, qui n'a duré en réalité que l'espace d'une grosse année, entre 1793 et 1794, s'est donc poursuivie nettement plus longtemps. La méfiance et la crainte règnent dans les rues de la capitale, malgré les succès du général Bonaparte qui se prépare à envahir l'Angleterre. Le roman rend à merveille l'ambiance de cette Paris uchronique, avec le désenchantement engendré par la disparition des idéaux révolutionnaires, la faim et la misère omniprésentes et les violentes fluctuations de l'opinion publique.

C'est un cadre idéal pour faire évoluer les deux protagonistes, dont on ne tarde pas à comprendre qu'ils ne sont autres que les fameux chevalier d'Éon (Geneviève) et marquis de Sade (Louis). Mine de rien, c'est assez rafraîchissant de suivre des héros qui ont passé la cinquantaine, voire la soixantaine pour le premier ; cela leur confère un surcroît d'humanité qui les rend d'autant plus attachants. Les références aux véritables carrières de ces deux personnages hauts en couleur ne sont jamais envahissantes. Johan Heliot a également le chic pour leur mettre dans la bouche des répliques pleines de verve et de truculence qui leur donnent vie.

L'intrigue est quant à elle rondement menée, pleine de tension, de mystères et de coups de théâtre qui font qu'il est difficile de lâcher le livre avant la dernière page. C'est une belle réussite qui plaira aux aficionados de bons romans policiers et de bonnes uchronies.

 Sam Therapy
Publié le 3 juin 2022

à propos de la même œuvre