Ecrit avec toujours autant d’humour mais avec un ton plus sérieux, maturité oblige, « Le Voyage du Basilic » est aussi prenant, avec son mélange de zoologie, d’ethnologie et réflexions sur la société, en particulier sur la place et le rôle des femmes, que les deux volumes précédents et il introduit plusieurs personnages intéressants et nouveaux : l’inflexible et malin capitaine fou du Basilic, Aékinitos, l’archéologue trompe-la-mort Suhail et le fils d‘Isabelle, Jake, passionné par beaucoup de choses – dont la mer et les navires – mais pas, au désespoir de sa mère, par les dragons.

Brennan - Le Voyage du Basilic - ActuSF
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Les coups de coeur de Jean-Luc Rivera - septembre 2017

Jean-Luc Rivera est un passionné et un érudit de tous les genres de l’Imaginaire. Organisateur du Festival de Sèvres, conférencier et membre du jury du Grand Prix de l’Imaginaire, il nous fait partager régulièrement ses coups de cœur sur Actusf.

J’ai déjà eu l’occasion de vous parler de la série en cours de Marie Brennan sur les souvenirs d’Isabelle, lady Trent, vieille dame indigne et naturaliste de renom car elle est la spécialiste incontestée des dragons dont elle a révolutionné l’étude et la taxonomie dans les cercles scientifiques du Scirland (ce pays aussi collet monté et aristocratique que l’Angleterre de la fin du XIXème siècle) : après « Une Histoire naturelle des dragons » puis « Le Tropique des Serpents », voici maintenant le troisième volume de ses souvenirs, « Le Voyage du Basilic  » (tous trois à l’Atalante). Lady Trent continue de nous livrer ses souvenirs, ici sur la première expédition scientifique organisée par elle-même, faisant face aux difficultés financières et surtout aux critiques nombreuses et aux ragots sans fin sur sa vie dissolue (elle ose partir sans chaperon ! et ce sur un navire plein d’hommes seuls, avec son assistant…). Avec beaucoup de finesse, Marie Brennan fait évoluer la psychologie de son personnage : certes, Isabelle est toujours aussi enthousiaste quand il s’agit de dragons, mais la maturité la rend légèrement moins impulsive, elle s’intéresse maintenant à son fils Jake - fibre maternelle tardive – qui a dix ans et elle se penche plus sur les implications politiques de ses actes. Et de la politique il y en aura, elle refusera de retourner au Bayembé malgré les amis (et les énigmes irrésolues) qu’elle y a laissé alors qu’elle part explorer le Grand Nord et ses serpents de mer avant de se rendre au Coyahuac pour y étudier les quetzalcoatls (ces serpents à plumes appartiennent-ils au genre des dragons ?) puis au Yélang et dans la Mer Brisée, après avoir connu nombre de mésaventures dans ce dernier pays. Et c’est sur l’île de Kéonga que la politique, de manière inattendue, la rattrapera car elle se retrouvera mêlée à des intrigues de pouvoir internationales – dans lesquelles le Scirland est naturellement impliqué… Ce troisième volume des mémoires de Lady Trent nous apporte aussi de nouvelles informations sur l’antique civilisation disparue des Draconiens, qui a laissé des vestiges énigmatiques sur tout le globe : avec son ami Suhail, archéologue aussi peu conventionnel qu’elle, Isabelle va découvrir des ruines inconnues commencer à lui indiquer des liens possibles entre son sujet d’études obsessionnel et celui de Suhail. Ecrit avec toujours autant d’humour mais avec un ton plus sérieux, maturité oblige, « Le Voyage du Basilic  » est aussi prenant, avec son mélange de zoologie, d’ethnologie et réflexions sur la société, en particulier sur la place et le rôle des femmes, que les deux volumes précédents et il introduit plusieurs personnages intéressants et nouveaux : l’inflexible et malin capitaine fou du Basilic, Aékinitos, l’archéologue trompe-la-mort Suhail et le fils d‘Isabelle, Jake, passionné par beaucoup de choses – dont la mer et les navires – mais pas, au désespoir de sa mère, par les dragons. Comme pour les deux romans précédents, superbe couverture de Todd Lockwood qui signe aussi les belles illustrations intérieures (le caeliger, un dirigeable tout à fait spécial que je vous laisse découvrir avec Isabelle, p. 229 est magnifique) et traduction impeccable de Sylvie Denis. Et si vous n’avez pas lu les deux premiers volumes, voilà une lacune à combler de suite afin de pouvoir apprécier au mieux ce troisième tome qui nous fait attendre impatiemment le suivant.

 Jean-Luc Rivera

Publié le 19 septembre 2017

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