Ne vous fiez pas à la mine rébarbative du Troll sur cette couverture, signée Gilles Francescano car le Troll de Jean-Claude Dunyach peut se montrer, quand il le veut, très urbain. Il faut juste savoir bien le prendre, or avec un verre d'eau ferrugineuse, cela devrait faire l'affaire.
Vous l'avez compris, aujourd'hui, on continue l'excellente série de Jean-Claude Dunyach, en plongeant dans le tome 2, intitulé, L'Enfer du Troll et paru en 2017, aux éditions L'Atalante.
Après avoir claqué la porte de la mine, le Troll a décidé de se consacrer exclusivement à sa dulcinée en l'aidant à améliorer son salon de coiffure. Mais quand son ancien patron vient toquer à sa porte pour lui confier une mission, il n'a aucune envie d'accepter, mais c'est sans compter sa très persuasive trollesse. C'est comme ça que, sans crier gare, il embarque sur un paquebot en compagnie de Cédric, de Sheldon, de Brisène et de toute une flopée de chevaliers pour mener une quête dont il n'appréhende pas encore bien la finalité.
Dans ce deuxième volet, on retrouve les héros de la première heure qui s'apprêtent à vivre de nouvelles aventures. C'est ainsi que le Troll et sa trollesse accompagnent Brisène et Sheldon dans leur voyage de noces. Cela donne l'occasion à Jean-Claude Dunyach d'explorer les aléas de la vie de couple avec un Sheldon soumis, complètement sous la coupe de sa femme. Avec son regard désabusé et sa plume caustique, l'auteur nous promet ici quelques moments choisis de scènes d'amour, parfois vache mais toujours sincère.
Derrière ces relations hautes en couleurs qui nous tirent quelques rires entendus, Jean-Claude Dunyach nous plonge également dans une nouvelle quête car tel est le but de tout héros d'épopée qui se respecte. Bien que toujours louable, la mise en œuvre de celles-ci ne manque jamais de rocambolesque et d'absurdité. C'est la grande qualité des récits de Jean-Claude Dunyach qui se montrent toujours d'une grande finesse et d'une belle perspicacité. Aussi, il revisite les éléments traditionnels du genre fantasy en les interrogeant. Par exemple, il s'intéresse ici à la figure du héros en questionnant sa fonction et son rôle. Pour cela, il utilise celle très usitée du chevalier en soulevant leurs difficultés, notamment celle de trouver le Graal. Raison pour laquelle, Arthur les a inscrit à une formation professionnelle afin qu'ils développent des stratégies à mettre en œuvre pour enfin atteindre leur objectif. Féru de nouvelles technologies, Sheldon a même été plus loin en développant une application GPS capable de détecter la sainte relique, si d'aventure cette dernière se trouvait dans les parages.
Par le truchement de ces scènes décalées et drôles, on reconnaît, bien entendu, une métaphore de la vie d'entreprise, à travers son carcan protocolaire et ses obligations imposées aux salariés. L'Enfer du Troll cache en réalité une satire de la vie professionnelle dans ce qu'elle peut avoir d'absurde et de pesant.
Entre un humour grinçant et une vision acérée de notre société, Jean-Claude Dunyach sait toujours trouver les mots pour nous divertir avec la juste dose de dérision.
Fantasy à la Carte