Dans le premier tome de la série, nous avons fait la connaissance de Koli, chassé de son village, Mythen-Croyd, pour s’être approprié un tech, apanage exclusif des Remparts, tous issus de la même famille.
Il doit faire face à une végétation hostile, une faune redoutable et des ennemis humains tout aussi dangereux. Grâce à l’aide de ses compagnes de voyage, Ursala, la guérisseuse itinérante et son larbin (un tech diagnostic, mais également une arme puissante) et Tasse, la guerrière, sans compter Monomo, la fille du boîtier tech. Dans le second tome, nous avons suivi les aventures des trois comparses en route pour Londres, d’où semble provenir un signal qui pourrait dater d’avant la Guerre Inachevée. Ils espèrent y trouver des survivants. Nous les avons laissés atteignant l’Épée d’Albion, le cœur rempli d’espoir pour sauver l’humanité. Ils veulent découvrir le moyen de renforcer la natalité, de combattre la flore et la faune tranformées en ennemies mortelles des hommes, redécouvrir un peu de cette technologie qui donnera aux humains la chance de repartir à zéro. Ils vont bien trouver quelques réponses, mais pas celles qu’ils attendaient, et devront lutter pour survivre et réaliser leur rêve.
Pendant ce temps, Toupie est devenue une des dirigeantes de Mythen-Croyd et organise la résistance contre la cité de Half-Ax et son chef, le Pacificateur, bien décidé à s’emparer de tous les techs et à détruire le village. Les deux axes narratifs se croisent tout au long du récit, s’étoffant l’un l’autre pour offrir un tableau riche et puissant d’une post-apocalypse où la nature prend sa revanche sur les humains, où ceux-ci, sans mémoire et sans passé, se sont fragmentés en petits groupes qui se déchirent.
Le rythme est soutenu, avec des chapitres alternés qui se répondent et s’enrichissent au fil de l’histoire. Les enjeux sont approfondis et résonnent là encore de façon très intense : le bouleversement climatique, les manipulations génétiques, la transidentité, les clones, l’intelligence artificielle, la dictature et la mégalomanie des puissants. Chacun est traité de manière subtile, en questionnant leurs conséquences, la nature même de la vie, carbonée ou robotique, l’acceptation de la différence, la puissance et l’importance de la mémoire collective.
Toutes les questions posées au long des trois tomes trouvent ici des réponses, parfois heureuses, parfois douloureuses. Les personnages acquièrent une profondeur remarquable : Koli ne cesse de s’interroger sur son rôle et ses obligations, envers son village et ses semblables, Tasse, la fille piégée dans un corps de garçon, devra décider jusqu’où elle souhaite aller, Toupie doit apprendre à devenir mère et cheffe en même temps et à porter le poids des responsabilités, Ursala la solitaire à accepter de faire confiance, Monono, quant à elle, choisira si elle garde une part de sa personnalité humaine ou s’affranchit totalement.
L’univers s’enrichit des réponses que l’auteur apporte au fur et à mesure du récit, avec toujours cette narration fluide et ce monde très original dont le background est particulièrement soigné. Un tome qui conclut brillamment une trilogie remarquable !
Sylvie Gagnère
