Avec Pyramides, Terry Pratchett penche sans vergogne du côté de la parodie, nous gratifiant d’une réécriture par l’absurde de l’Histoire et des légendes des peuples du bassin méditerranéen. Dans une version décalée de l’Égypte antique, où le pharaon règne à la sueur du front de ses esclaves, sous la houlette d’un clergé oscillant entre omnipotence et ventripotence, l’auteur britannique multiplie les jeux de mots, les situations cocasses, jonglant avec les concepts de la physique quantique et de l’immortalité. Terry Pratchett met aussi sur la sellette la foi et les croyances religieuses, opposant la tradition, incarnée ici par le grand prêtre Dios, au progrès rapporté de l’extérieur par un Teppic ouvert à la modernité et au changement.

Pratchett - Pyramides - Yossarian
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Avec Pyramides, Terry Pratchett penche sans vergogne du côté de la parodie, nous gratifiant d’une réécriture par l’absurde de l’Histoire et des légendes des peuples du bassin méditerranéen. Dans une version décalée de l’Égypte antique, où le pharaon règne à la sueur du front de ses esclaves, sous la houlette d’un clergé oscillant entre omnipotence et ventripotence, l’auteur britannique multiplie les jeux de mots, les situations cocasses, jonglant avec les concepts de la physique quantique et de l’immortalité. Terry Pratchett met aussi sur la sellette la foi et les croyances religieuses, opposant la tradition, incarnée ici par le grand prêtre Dios, au progrès rapporté de l’extérieur par un Teppic ouvert à la modernité et au changement.

    « Ce fut à peu près à cet instant que le plus grand mathématiciens du Disque, couché dans la flatulence douillette de sa stalle sous le palais, cessa de ruminer et s’aperçut qu’il se passait quelque chose d’anormal avec les nombres. Avec tous les nombres. »
J’avoue m’être beaucoup amusé en lisant ce septième volet des « Annales du Disque-Monde ». La faute à une intrigue délirante et maîtrisée jusqu’au bout. La faute aussi à un personnage principal sympathique qui ne connaîtra pas, hélas, d’autres incarnations. La faute enfin au nonsense habituel de l’auteur, mais également à un foisonnement de personnages secondaires mémorables. Terry Pratchett se montre en effet sur ce point très inventif, accumulant les trouvailles. De Sale-Bête, le chameau roulant sa bosse des mathématiques dans les dunes, à Dios, le grand prêtre passablement rigide, en passant par Ptorothée, la concubine royale rebelle, sans oublier un maître embaumeur et son apprenti, et la famille de Ptaclusp, bâtisseurs de pyramides de père en fils (bis), on comprend que les choses ne demandent qu’à déraper pour le meilleur et pour le rire. Ajoutons à cela, un voisinage composé de deux puissances belliqueuses ayant envie de rejouer la guerre de Tsort avec son cheval de bois (ou peut-être était-ce une vache ? Un cochon ? Ou alors un poulet ?). Une poignée de grands esprits réunis en symposium pour discourir de la République idéale (un spectacle pas cirrhose que ça). Un sphinx confronté aux failles logiques de son énigme, Et pour terminer, une multitude de dieux plus vrais que (sur)nature, libérés de leurs obligations cultuelles à l’occasion d’une modification localisée de la réalité consensuelle. Bref, Terry Pratchett donne du grain à moudre à nos zygomatiques.

Mais surtout, il nous révèle enfin LE secret des pyramides. Une arcane dont la révélation ferait passer le paradoxe du chat de Schrödinger pour une charade enfantine, si elle n’impliquait pas des équations ésotériques et supra-irrationnelles.

    « Il n’y a rien de mystérieux dans le pouvoir des pyramides. Les pyramides sont des barrages dans le cours du temps. Si la grande masse de pierre est correctement conçues et orientée, correctement bâtie aux bonnes mesures paracosmiques, son potentiel temporel peut être détourné pour accélérer ou renverser le temps à l’intérieur d’un espace restreint, de la même façon qu’on fait pomper de l’eau à un bélier hydraulique contre le courant. Les premiers bâtisseurs, évidemment vieux et sages, connaissaient parfaitement cette particularité, et le but dans une pyramide correctement construite, c’était d’obtenir un temps absolument nul dans la chambre centrale afin que le roi défunt vive bel et bien éternellement – ou du moins ne meure jamais vraiment. Le temps qui aurait dû passer dans la chambre s’emmagasinait dans l’ensemble de la pyramide, et on le laissait se décharger dans un embrasement toutes les vingt-quatre heures. »

Au final, après Trois Sœurcières, je ne ne cache pas une nouvelle fois mon enthousiasme pour l’auteur britannique. Du coup, je suis impatient de lire ce qu’il me réserve avec le huitième volet de ses annales. Bientôt…

Yossarian

Publié le 14 avril 2016