Avec Children of Earth and Sky l’auteur semble avoir non plus vraiment cherché à construire un récit sous tension mais un roman plus méditatif sur la condition humaine, s’éloignant ainsi d’un petit pas du récit d’aventure épique pour se rapprocher du conte philosophique.

Kay - Enfants de la terre et du ciel - Elbakin
Article Original

Promu en 2014 à l’ordre du Canada, une des plus prestigieuses distinctions honorifiques civiles du pays, Guy Gavriel Kay s’est imposé en 32 ans de carrière et 13 romans en développant (à l’exception de sa première trilogie) un style propre plus proches des romans historiques que de fantasy classique. Children of Earth and Sky a aussi été bâti sur ce principe très justement qualifié de « history with a quarter turn into fantastic ».

Après deux ouvrages situés dans une Chine imaginaire, l’auteur nous ramène ici dans un cadre méditerranéen qu’il a déjà exploré précédemment (« La Mosaïque de Sarrance » en particulier auquel le roman fait plusieurs fois subtilement référence). On retrouve le talent de l’auteur pour s’approprier une époque et la retranscrire à sa manière. L’univers servant de toile de fond est superbement dépeint ce qui lui donne une vraie profondeur historique. Le tout étant d’ailleurs tellement bien décrit que l’époque réelle ayant inspirée l’auteur est facilement identifiable. Comme à son habitude, l’auteur rajoute à ce tableau une touche de surnaturel qui bien que très légère réussi à donner une ambiance plus particulière que celle d’un roman qui n’aurait pas ce soupçon de fantastique.

Côté personnages, l’auteur nous offre une importante galerie de protagonistes aussi divers que variés. Là aussi on retrouve le talent de l’auteur pour rendre tous les personnages dès la première rencontre immédiatement intéressants et vivants. Il réussit à donner à chacun une personnalité et une identité propre ce qui fait qu’aucun ne semble être factice.

Pour ce qui est de l’intrigue, l’auteur a bâti son histoire comme une grande fresque se déroulant sur une zone géographique assez étendue où il a disposé ses personnages comme des pions prêts à servir l’avancée de la partie qui va se dérouler. Tout le jeu va être d’entrelacer les différentes destinées qu’au départ rien ne lie pour qu’au final elles soient toutes interconnectées. Pour ce faire, le roman est composé de chapitres assez courts sautant continuellement d’un personnage à un autre. Si cette structure permet de tisser un fil reliant petit à petit tous les personnages, ces sauts se succédant de façon assez fréquente surtout dans la première moitié, finissent par donner un petit côté frustrant à la lecture, le lecteur ayant sans arrêt l’impression d’être ballotté d’un personnage à un autre. De plus, ces changements incessants de personnage ont aussi pour effet de morceler et de ralentir l’intrigue.

Le récit suit de très près les actions et les ressentis de chacun des personnages plus sous forme de patchwork que d’un fil continu. L’auteur se focalise seulement sur certains événements clefs qui vont avoir une importance particulière pour les personnages. Ces événements peuvent d’ailleurs être étudiés sous le point de vue de différents personnages, ce qui donne un intéressant effet kaléidoscopique. Le roman est aussi marqué par la tendance de l’auteur à couper la narration sur le vif de telle ou telle scène pour prendre de la hauteur et partir sur des considérations plus philosophiques. Comme si dans ce livre l’auteur était moins intéressé par les évènements eux-mêmes que leur impact à plus ou moins grande échelle.

Avec Children of Earth and Sky l’auteur semble avoir non plus vraiment cherché à construire un récit sous tension mais un roman plus méditatif sur la condition humaine, s’éloignant ainsi d’un petit pas du récit d’aventure épique pour se rapprocher du conte philosophique.

Siriane

Publié le 7 septembre 2018

à propos de la même œuvre