On poursuit joyeusement le voyage au travers de l'univers fantasque et ciselé d'un Glen Cook au sommet de son art.

Les Chroniques de l'Imaginaire

Piper Hecht doit quitter sa mission de destruction des Instrumentalités au Connec pour assister au mariage de l'impératrice Katrin. Le capitaine général ne comprend certes pas pourquoi il bénéficie de cet honneur, il est cependant obligé de laisser ses hommes et de se plier à son devoir. De plus, sa présence à cette cérémonie le contraint à subir la proximité de la princesse Helspeth. La sœur de l'impératrice et lui sont attirés comme des aimants même s'ils s'interdisent toute forme d'aventure.

De son côté, Nassim Alizarin dit La Montagne a fait sécession à la suite du meurtre de son fils Hagid. Il s'est retourné contre son maître d'alors Gordimer le Lion. Désormais le voilà bien décidé à venger la perte de son enfant en punissant les coupables, le Lion et le sorcier er-Rashal al-Dhoulquarnen.

On retrouve avec bonheur Piper Hecht, anciennement Else Tage, toujours au commande de l'armée patriarcale. Il vit désormais à Brothe en compagnie d'Anna Mozilla et de leurs enfants adoptifs : Pella, Vali et Lila, arrachées à une maison de prostitution. Il jouit de la protection du principaté Munio Delari ainsi que de la surveillance attentive du très puissant Neuvième Inconnu Cloven Februaren qui a déjoué nombre de tentatives de meurtres à son encontre avant qu'il ne s'en rende compte la plupart du temps.

On continue notre progression au sein de la très bonne saga de Glen Cook. Les ingrédients sont les mêmes que précédemment : manigances politiques que ce soit au niveau religieux ou au niveau territorial. Piper, de part sa position centrale au sein de l'Église, puisqu'il a l'oreille du patriarche, est évidemment extrêmement courtisé autant que haï. Il est bel et bien le pivot de l'histoire, pourtant il existe suffisamment de personnages et d'intrigues secondaires dans les différents empires ou royaumes pour que son rôle ne phagocyte pas l'intégralité du déroulement de la narration.

Étant donné qu'à ce stade de l'histoire, les forces en présence sont connues, de même que la situation générale, le roman peut se développer sans accroc avec son lot de meurtres, de péripéties, de succession à la tête du pouvoir religieux, son suspense et il faut bien avouer que c'est très agréable de se laisser porter par le talent de l'auteur car tout cela est orchestré de main de maître. On a appris à connaître les personnages et à s'attacher à eux. On a vu Piper Hecht s'occidentaliser progressivement au point d'oublier, autant que lui, sa mission première et le pourquoi de sa venue en territoire ennemi. Il est désormais intégré à Brothe bien qu'il ne s'habitue pas au fait de manger du porc ; il s'est construit une famille, une assise solide. Il est vrai que, parfois, quand une personne s'avise de fouiller un peu trop dans son passé, des bouffées d'angoisse le submergent puis il se souvient qu'il bénéficie de puissants appuis dont certains connaissent parfaitement sa vie ainsi que sa véritable identité.

Il est quand même essentiel de mentionner la scène ubuesque qui débute à la page 309 et qui narre l'entrevue entre le nouveau patriarche et Piper Hecht, sous l'influence d'un sort qui lui a été administré par le principaté Delari. Le pauvre Piper se trouve aux prises avec des dérangements intestinaux plutôt bruyants qui mettent à mal sa crédibilité ainsi que son orgueil sous l'œil effaré d'un patriarche pour le moins gêné et contraint de couper court à l'audience. En outre, ce sort qui, bien entendu, a un intérêt capital, fait horriblement souffrir celui-ci physiquement et moralement. En revanche ce passage est absolument incontournable pour le lecteur, qu'on aime ou pas ce genre d'humour. Il est tout bonnement irrévérencieux, loufoque, irrésistible.

En somme, on poursuit joyeusement le voyage au travers de l'univers fantasque et ciselé d'un Glen Cook au sommet de son art.

Sig (06/03/2012)

Publié le 23 janvier 2013