Comme l’exigeait la forêt est une fable sombre à l’ambiance particulièrement réussie qui nous envoûte sans faillir.

Comme l'exigeait la forêt - Les critiques de Yuyine
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Quel régal de se plonger dans un récit qui reprend tous les codes de la fable classique avec une ambiance sombre comme il faut ! Dès les premières lignes, nous nous retrouvons embarqués aux côtés de Véris, jeune femme du village qui semble avoir déjà beaucoup perdu, et qui se voit ordonner de risquer sa vie pour replonger dans l’Ormévère, un endroit dont personne ne revient jamais, sauf elle, il y a de nombreuses années. Son objectif : trouver les enfants du Tyran et les sauver avant qu’il ne soit trop tard. L’ambiance, déjà oppressante, devient rapidement étouffante dans ces bois mystérieux où rien n’est tout à fait ce qu’il semble être. Premee Mohamed nous offre un récit aux accents horrifiques particulièrement envoûtant. Tout semble possible sous les ramures de ces arbres étranges, toutes les illusions comme tous les dangers. L’univers imaginé emprunte aux classiques du genre mais aussi à nos peurs primitives, auxquelles s’ajoute l’imagination formidable de Premee Mohamed qui fait décidément de la nature son terrain de jeu. Je regrette seulement que le format court ne nous permette pas plus de développement tant j’ai aimé l’ambiance de ce texte et les sujets qui y sont abordés.

L’histoire ressemble à un conte aux nombreuses péripéties et détours, laissant sans cesse planer le doute sur l’issue de toute cette épopée. Mais sous le couvert de la fable, l’autrice y verse aussi des réflexions profondes et puissantes sur le deuil, la perte, l’innocence, l’héritage ou encore la monstruosité. Le monde réel est-il plus cruel que celui des bois ? L’humanité n’est-elle pas aussi fourbe que ces créatures mystérieuses qui se jouent de vous ? L’Ormévère se fait reflet du monde extérieur à ses bois et nous permet de questionner l’injustice dont sont victimes les petites gens comme Véris face à des hommes de pouvoir. Son récit, glaçant, trace dans cette histoire un sillon sordide qui laisse des marques et ajoute à l’ambiance malaisante très réussie. En effet, Comme l’exigeait la forêt n’a rien d’une fable idyllique, on pressent même que, quelle que soit l’issue, elle ne sera jamais vraiment bonne. Il y fait sombre sous les feuilles des arbres comme dans le cœur des hommes. Mais heureusement, il reste quelques éclats de lumière à saisir. J’ai particulièrement aimé la noirceur de ce récit et la force de caractère de son héroïne qui me restera en mémoire. Premee Mohamed m’a convaincue dans un tout autre registre et j’ai désormais en plus hâte de la découvrir sur ces prochains titres.

En bref, Comme l’exigeait la forêt est une fable sombre à l’ambiance particulièrement réussie qui nous envoûte sans faillir. Bien que le format court m’ait frustrée parce que j’aurais aimé approfondir un peu plus cette épopée glaçante, j’ai été conquise par ce récit glaçant qui porte une magnifique réflexion sur la monstruosité et parle de deuil avec justesse. Premee Mohamed s’inscrit définitivement pour moi parmi les autrices à suivre.

Publié le 23 juillet 2025

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