Un voyage que je n’oublierai pas de sitôt porté par une magnifique plume !

Comme l'exigeait la forêt - Arpenteuse de l'étrange
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Tout d’abord, je découvre avec ce roman la plume de Premee Mohamed et je suis sous le charme ! C’est à la fois doux et cruel, intime et simple dans sa perception de l’individu, mais universel et recherché dans les thématiques qu’elle traite. Je vais d’office me jeter sur ses autres romans ! 

J’ai adoré l’ambiance de ce roman. La forêt est un protagoniste à part entière. L’Ormévère est magique, mouvante, faite de sombres songes et de dures réalités. Elle ne fait pas de cadeau, mais reçoit les sacrifices avec avidité. Elle s’adapte à son hôte et ne souhaite pas le voir partir. Elle est à la fois attirante et repoussante, d’une beauté sauvage et d’une horreur sans nom. J’ai eu l’impression de me retrouver dans les pages du Livre des choses perdues qui avait été un énorme coup de coeur à l’époque, ou encore dans Annihilation, mais dans sa version magique et pas scientifique. Tout à fait passionnant.

Les personnages qu’on y croise sont tout aussi fascinants. Ils sont les habitants de nos contes et légendes, créatures magiques qui peuvent aussi bien être bénéfiques que maléfiques. Ils sont cependant distordus, déformés par cette forêt qui ne laisse personne s’échapper. Comme toujours, la magie demande un prix et il est souvent lourd à payer. Chacun veut, voire exige, sa part du gâteau, car les visiteurs se font rares sur les chemins de l’Ormévère.

Ce récit est aussi une course contre la montre car si on ne sort pas de l’Ormévère après une journée, on en est prisonnier à jamais. Véris n’a pas de moyen de vérifier le temps qui passe et le ciel n’est pas fiable dans une forêt où tout n’est que mirage. Il y a donc toujours cette tension de savoir si le temps imparti est révolu ou s’ils ont encore une chance de s’en sortir. Il faut aussi apprendre à ne pas se presser malgré le temps qui s’écoule inexorablement, à ne pas se précipiter là où la patience et la ruse sont requises.

L’héroïne n’a rien de spécial à part qu’elle est la seule à avoir réussi à sortir de l’Ormévère. Le tyran, dont les enfants s’y sont aventurés, ne lui laisse d’autre choix que de retourner sur ces sentiers qui la hantent. On en apprendra peu sur son premier périple, des bribes disséminées çà et là, mais le second voyage est encore plus terrifiant car Véris sait à quoi s’attendre et en même temps, pas du tout. Elle utilise un peu la magie, mais surtout son intelligence et sa ruse pour s’en sortir, même si parfois le sacrifice à faire est douloureux. Et surtout on apprend qu’on ne triche pas avec la forêt, elle le saura toujours.

Dans cet univers entre rêve et cauchemar, Véris est une adulte pleine de bon sens, mais qui a vécu beaucoup d’événements traumatisants, notamment à cause de la guerre causée par le tyran. Elle va cependant devoir composer avec les enfants de celui-ci, leur naïveté, leur innocence, et leur éducation, dont le fait qu’ils ne sont pas au courant des légendes qui entourent l’Ormévère. Et surtout se rappeler qu’elle ne peut pas se venger sur eux des horreurs de leur père, qu’elle ne peut pas présumer de ce qu’ils deviendront, et que même s’ils devenaient des monstres comme leur père, elle ne serait pas responsable de ce qui en découlerait si elle les sauve. Il faut vivre dans le présent et faire des actions qui font qu’on est bien avec soi-même.

J’ai adoré ce roman.

Gros coup de coeur pour ce roman court : une sombre et inquiétante forêt magique, habitée par de facétieux personnages qui vont tout faire pour entraver le périple déjà compliqué de notre protagoniste, une course contre le temps qui passe mais aussi contre les traumatismes du passé, une rencontre entre la dureté de la réalité et l’innocence d’un jeu d’enfant. Un voyage que je n’oublierai pas de sitôt porté par une magnifique plume !

Premee Mohamed est la nouvelle plume traduite par l’Atalante. Ces autres romans ont l’air tout aussi passionnants, n’hésitez pas à aller faire un tour dans le catalogue de la maison d’édition pour vous laisser tenter. Ce sont majoritairement des formats courts et donc peu chers (11,50- 12,50), c’est une raison de plus pour craquer !

Publié le 3 septembre 2025

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