En somme, une histoire fort plaisante, que je ne peux que recommander : à lire ou à relire.

L'Arbre de l'été - Les Chroniques de l'imaginaire
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Une conférence de Lorenzo Marcus est un évènement rare à Toronto. C'est pourquoi Jennifer Lowell, Kimberly Ford et Kevin Laine ont décidé d'y assister. Paul Schafer a suivi : plus grand-chose ne l'intéresse depuis la mort de Rachel un an plus tôt. Sur place, ils rencontrent Dave Martyniuk, un autre étudiant en droit, et quand, après la conférence, ils sont invités à prolonger la soirée avec l'orateur, ils l'emmènent avec eux. De ce fait, il lui est fait la même proposition de voyage qu'aux quatre amis.

Métran, premier mage du Brennin, a chargé Lorèn Mantel d'Argent de lui ramener cinq étrangers d'un autre monde pour le cinquantième anniversaire du règne d'Ailell, le Haut-Roi. Ils ne seront cependant que quatre dans la grande salle du palais de Paras Derval. En effet, Dave a été séparé d'eux pendant le transfert. Si eux arriveront, comme prévu, dans les appartements de Lorèn à Paras Derval, lui atterrira dans la Plaine, loin au nord, et rencontrera les Dalreï, les Cavaliers.

Pendant ce temps, le quatuor ne tarde pas à s'émietter : Kim a été rêvée par Ysanne, la prophétesse du Brennin, pour prendre sa suite et porter le poids de la pierre de la guerre ; Kevin et Paul sont entraînés par Diarmuid, le fils cadet et héritier du roi, dans une folle aventure qui les liera au prince et à ses hommes ; à leur retour, toutefois, Paul choisit d'offrir au roi d'aller à sa place dans l'Arbre de l'été, afin d'intercéder auprès du dieu Mörnir pour qu'il ramène la pluie qui manque depuis des mois au Brennin. Quant à Jennifer, elle passera une soirée de chants et de beauté avec les lios alfar, les elfes de lumière, avant d'être enlevée par un parti de créatures des ténèbres mené par Galadan, le Seigneur Loup.

Au moment où le jeune Guy Gavriel Kay de trente ans a écrit la trilogie dont ce roman est le premier tome, il travaillait avec Christopher Tolkien sur les écrits laissés par le père de celui-ci. L'influence de J.R.R. Tolkien est incontestable dans ce premier tome. Toutefois, en y regardant de plus près, elle apparaît finalement assez superficielle.

Bien sûr, l'un des personnages principaux est un mage... mais d'une part Lorèn est très différent de Gandalf et d'autre part la forme de magie de Fionavar, avec les "sources" liées aux mages, est loin de cette magie intrinsèque à ces êtres supérieurs que sont les Cinq Magiciens dont Gandalf fait partie. Bien sûr, il y a des elfes, séparés entre elfes de lumière et créatures des ténèbres, et c'est sans doute ce qui est le plus proche de l'univers de Tolkien. Bien sûr, on ne peut que penser aux Rohirrim quand on fait la connaissance des Dalreï et qu'on apprend leur histoire, surtout la partie concernant la Chevauchée de Revor. Mais leur société n'est pas féodale, et cela change beaucoup de choses, comme la présence des eltors, celle de Géreint le chamane, et le jeûne de rencontre avec les totems.

Surtout, Fionavar existe dans un univers où elle est le premier des mondes, mais non le seul. On pourrait imaginer que la Terre du Milieu appartiendrait à un passé plus ou moins lointain, plus ou moins parallèle, mais on n'en sait rien. En revanche, la Fionavar où marchent Mörnir, Dana et les autres dieux coexiste en parallèle avec la Terre où de jeunes habitants de Toronto vont à un Colloque International sur les Celtes. Les filles et femmes de Fionavar sont très loin d'être effacées : il n'est que de penser à Jaëlle pour le constater, mais Sharra, Leïla, ou même Ysanne, à sa façon, sont de fort bons exemples aussi. Toutes sont des personnages à part entière, et ne vivent pas dans l'ombre des hommes, ou par rapport à eux. C'est là une différence majeure par rapport à l'univers créé par Tolkien.

C'est une bonne idée de l'éditeur de proposer cette réédition, qui permettra à de jeunes lecteurs et lectrices de découvrir cette œuvre de jeunesse de l'un des grands auteurs actuels de fantasy. Ce roman se lit facilement, car le rythme en est enlevé, il comporte beaucoup d'action, dans des ambiances suffisamment différentes pour garder l'intérêt en éveil. La création de personnages cohérents, crédibles et attachants est l'une des caractéristiques de l'auteur canadien, et on la voit à l'œuvre ici. Tous sont plus grands que nature, tous sont extraordinaires, tout en laissant de la place pour leur évolution. Etant donné leur nombre, et l'éparpillement de l'action, la carte et la liste de personnages fournies en préambule sont fort utiles, et on pourra utilement s'y référer.

C'est un premier tome, toutefois, et cela signifie que même s'il a un début et une fin bien marqués et satisfaisants, il ouvre le rideau sur un univers où rien n'est conclu à la fin, au contraire. Le tome suivant étant annoncé pour début août, il faudra attendre un peu pour savoir comment commencera véritablement la guerre déclarée dans les dernières pages.

En somme, une histoire fort plaisante, que je ne peux que recommander : à lire ou à relire.

Mureliane

Publié le 20 mai 2025