Entretien avec Clément Milian - Ouest France

Interview
25 avril 2023

Un conte parisien violent, dans les pas d'une ado

Après un polar en série noire et un roman historique, le Nantais Clément Milian revient avec un récit initiatique publié par la maison d'édition qu'il adorait adolescent, L'Atalante.

Depuis quand écrivez-vous ?

J'écris depuis que je suis adolescent et, "professionnellement", depuis la sortie de mon premier livre, en 2016 – Planète Vide ("Série Noire", Gallimard) – qui se situe dans le même Paris ) à la fois réaliste et fantasmé qu'Un conte parisien violent. J'y ai vécu longtemps, notamment place Stalingrad, où a lieu le roman. Entre-temps j'ai publié un roman médiéval, Le triomphant (Éditions Les Arènes). C'est grâce à lui que mes éditeurs, Caroline de Benedetti et Émeric Cloche, m'ont proposé de rejoindre la collection Fusion, à L'Atalante. En tant que Nantais qui a grandi avec les livres de cet éditeur, d'Orson Scott Card à Michael Moorcock, ça fait une boucle cohérente : en retournant vivre à Nantes, j'ai rejoint la maison qui me faisait rêver quand j'allais, gamin, emprunter des Pierre Bordage à la bibliothèque.

Qui est Salomé, l'héroïne de votre nouveau roman ?

Une ado de 14 ans qui zone place Stalingrad avec les toxicomanes, un peu par goût de la provocation, mais aussi pour se frotter au réel. À l'origine, j'avais écrit une anthologie qui s'appelait Contes parisiens violents. J'ai isolé et développé une des histoires, sur une ado qui a un peu trop le goût du risque et traîne avec des dealers. Salomé "joue à la violence", force un peu sur la vulgarité... enfin elle essaie d'exister, de crier plus fort que les autres. Ça vient d'une question assez simple, que je me pose en tant que père d'une petite fille : comment protège-t-on ses enfants quand ils grandissent ? Je pense que c'est un fantasme. La plupart ont ce besoin de foncer dans le mur, c'est plus fort qu'eux.

Y a-t-il une morale à ce conte ?

Non, ou alors elle est ironique, comme dans une fable de La Fontaine. J'aime la forme du conte, parce qu'elle est simple. C'est une manière d'assumer totalement le fait qu'on raconte une histoire. Je ne fais pas de commentaire politique sur la violence urbaine, je raconte l'histoire de cette ado et de son amitié avec un type un peu bizarre que tout le monde lui conseille d'éviter. Jusqu'à ce que tout bascule, parce qu'inconsciemment, c'est ce qu'elle cherche. Cette ado s'est imposée à moi, c'est la première fois que je me confronte à un personnage féminin. Je ne saurais pas dire pourquoi, mais j'ai vraiment l'impression de la connaître.

Ouest France